Sainte Joséphine Bakhita, une grâce d’enfance

Le 8 février, nous fêterons Ste Joséphine Bakhita, dite la Petite Mère Noire. Une esclave soudanaise devenue religieuse canossienne en Italie, dont la vie est paradoxalement un incroyable témoignage de liberté intérieure, acquise par l’amour et le pardon.
Pour découvrir cette sainte catholique, canonisée par le pape Jean-Paul II en l’an 2000, nous sommes allés à la rencontre de Jean-Paul et Guillemette Marot, auteur et metteur en scène de la pièce : « Bakhita », jouée en 2019 à Saint-Nazaire.

« Cette sainte fille d'Afrique montre qu'elle est véritablement une enfant de Dieu : l'amour et le pardon de Dieu sont des réalités tangibles qui transforment sa vie de façon extraordinaire. »

Guillemette et Jean-Paul Marot ont fait la connaissance de Bakhita un peu par hasard : « Pour Noël, notre gendre nous a offert Le journal de Bakhita*. J’ai pensé : une bonne sœur de plus ! Et puis, en lisant son journal, j’ai été saisi. On sentait que Bakhita était inspirée. » Jean-Paul, en homme de théâtre, a tout de suite eu envie d’écrire une pièce.

Marot JP G portraits

Pour cela, il n’a rien lu d’autre que Le journal de Bakhita, remarquable par son style oral mais surtout par sa pudeur, comme le remarque Guillemette : « Elle dit certaines des souffrances et des sévices qu’elle a vécus mais avec beaucoup de pudeur. Ce qui m’a marquée c’est que le Seigneur l’a gardée pour elle. Et puis, elle se contente de décrire les faits, elle ne les interprète pas. Elle ne porte pas de jugement sur ceux qui l’ont maltraitée et violentée. »

Pour autant, côté mise en scène, Guillemette n’est pas immédiatement emballée : « Je ne voyais pas comment trouver autant de comédiens noirs pour jouer la pièce. Cela me paraissait impossible. Il se trouve que j’ai donné des cours à un jeune soudanais et d’une manière mystérieuse, j’ai senti que le Seigneur ouvrait mon cœur en même temps que mes yeux. »

Jean-Paul comme Guillemette se sont laissés touchés par Bakhita : « Surtout par sa grâce d’enfance et sa capacité d’émerveillement : tout au long de sa vie, elle a été en admiration devant la nature, devant la Création. Comme si le Seigneur l’avait préparée à Le rencontrer. Une autre chose qui me frappe, c’est son esprit extrêmement positif qui lui a donné une grande force pour traverser toutes les épreuves qui ont jalonné son chemin. Enfin, sa liberté intérieure : c’était une esclave et pourtant elle était libre, profondément libre, notamment lorsqu’elle refuse de quitter l’Italie car elle veut poursuivre sa préparation au baptême. »

Jean-Paul, lui, retiendra cette expression de Bakhita, à propos du Seigneur : « C’est Lui le patron. » et de manière pragmatique et confiante, il demandera à Bakhita de l’aider à écrire la pièce…

Bakhita a vécu à la fin du XIXème siècle et jusqu’à la moitié du XXème, pourtant, son témoignage reste étonnamment actuel pour Guillemette : « Quand j’ai accompagné ce jeune soudanais, je me suis rendu compte que l’esclavage restait d’actualité aujourd’hui : sous de nouvelles formes bien sûr mais pas seulement. Les brimades physiques, par exemple, existent encore. Et je trouve que Bakhita montre un chemin à tous ceux qui se reconnaissent dans son itinéraire : un chemin de liberté, un chemin d’émerveillement devant la grâce de la vie, de la nature, de la beauté et des choses extrêmement simples. » Non seulement Bakhita montre un chemin mais elle écrit aussi une prière, le jour de sa profession religieuse, le 08 décembre 1896 :

« Ô Seigneur, si je pouvais voler là-bas, auprès de mes gens et prêcher à tous à grands cris ta bonté : Oh, combien d'âmes je pourrais te conquérir ! Tout d'abord ma mère et mon père, mes frères, ma sœur encore esclave... tous, tous les pauvres Noirs de l'Afrique, fais, ô Jésus, qu'eux aussi te connaissent et t'aiment ! »

Faire connaître Jésus et le faire aimer, c’est aussi un des leitmotivs du couple qui, au fil des répétitions, a annoncé le Christ aux différents acteurs, ainsi qu’au public le jour de l’unique représentation à St Nazaire, fin 2019 : les 25 acteurs, de 10 nationalités différentes et de confessions variées (musulmans, catholiques, protestants…) n’ont pas pu se retrouver plus souvent. « C’était une grâce particulière : jusqu’à la fin, j’ai fait un acte de foi car même à la répétition générale, il me manquait un acteur ! C’est le spectacle vivant : éphémère jusqu’à son paroxysme. » explique Guillemette. Quant à Jean-Paul, accessoiriste pendant la représentation, précise : « Comme je suis dans les coulisses, je ne vois jamais mes pièces mais je les entends. »

Un état de fait qu’ils acceptent avec philosophie : « Quand on sera au Ciel, on sera en représentation perpétuelle… »

En tout cas, celle-là s’est terminée sur cette phrase, qui est aussi la dernière du Journal de Bakhita : « On me dit pauvre petite, pauvre petite. Mais je ne suis pas une pauvre petite car je suis dans la maison du Seigneur. Ce sont ceux qui ne connaissent pas le Seigneur qui sont de pauvres petits. »

Biographie 

Vers 1869 : Naissance à Olgossa, province du Darfour, Soudan

1874 : enlèvement de sa sœur Kishmet, âgée de 14 ans

Vers 1877 : Enlèvement de Bakhita par des négriers musulmans

Entre 1877 et 1883 : Bakhita est vendue au moins 4 fois

1883 : Vendue au Consul d’Italie à Khartoum qui lui donne le prénom de Joséphine

1885 : Arrivée en Italie

1889 : Elle passe 9 mois à l’Institut des Catéchistes de Venise, tenu par des religieuses canossiennes, avec la fille de sa patronne, partie au Soudan. Elle y découvre la foi catholique et commence son éducation religieuse.

A son retour, Bakhita refuse de quitter l’Institut. L’affaire est portée en justice.

29 novembre 1889 : Bakhita est déclarée libre de choisir où elle veut rester puisque l’esclavage n’existe pas en Italie.

9 janvier 1890 : Baptême et confirmation par le cardinal-archevêque de Venise. Elle prend le nom de Joséphine Margaret Fortunata.

7 décembre 1893 : Bakhita rejoint le noviciat des Sœurs de la Charité à l’Institut de catéchuménat de Venise.

8 décembre 1896 : Elle prononce ses premiers vœux à Vérone

1902 : Elle part pour le couvent de Schio dans le Nord-Est de l’Italie où elle demeure jusqu’à sa mort.

1910 : A la demande de sa Supérieure, elle écrit son histoire, base de son Journal.

1927 : Elle prononce ses vœux perpétuels : on lui donne le surnom de Petite Mère Noire (Madre Moretta)

Pendant la 2nde Guerre Mondiale, alors que la ville de Schio est bombardée, aucun habitant ne périt. Bakhita est considérée comme leur protectrice.

8 février 1947 : Décès à Schio, Italie

Les miracles commencent rapidement après son décès.

17 mai 1992 : Béatification par Jean-Paul II

1er octobre 2000 : Canonisation par Jean-Paul II

Couv Journal de Bakhita

* Journal de Joséphine Bakhita

De la servitude à la sainteté 

Edition Salvator

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