Saint John Henry Newman – Marcher avec les saints

Le 9 octobre, nous fêtons saint John Henry Newman, un chercheur de Dieu qui de l’anglicanisme s’est converti au catholicisme, ou il a poursuivi sa quête de vérité.

Cardinal John Henry Newman

Le 9 octobre, l’Église catholique fête un saint qui a été un chercheur de vérité, un grand intellectuel, un écrivain célèbre, un homme admiré et aussi très critiqué, un personnage qui a suivi sa conscience envers et contre tout : c’est le saint cardinal John Henry Newman. J’avoue me sentir tout petit pour évoquer avec vous une personnalité aussi gigantesque qui a marqué l’histoire du christianisme. Je dédie ce podcast à mon curé, le père Damien, grand admirateur de Newman et qui n’hésite pas à nous en parler souvent en paroisse. Merci à lui de nous partager sa passion !

John Henry Newman est né le 21 février 1801 à Londres. Sa famille est anglicane, mais peu pratiquante. C’est un garçon particulièrement intelligent. En 1816, il a 15 ans et fait une expérience spirituelle très forte au contact d’un pasteur évangélique. C’est ce qu’il appelle sa première conversion : « un grand changement se fit dans ma pensée, cette conversion concentra toute ma pensée sur deux êtres seulement : moi-même et mon créateur. » Son rapprochement avec les évangéliques rend Newman très hostile à l’Église catholique. Il considère à cette époque le pape comme l’antéchrist.

Newman entre à l’université d’Oxford où ses qualités intellectuelles apparaissent au grand jour. En même temps, il ressent l’appel au sacerdoce – et au célibat, ce qui n’est pas courant dans l’Église anglicane. Il est ordonné diacre dans l’Église anglicane en 1824 et prêtre en 1825. En 1826, il est nommé tuteur à Oriel College où il devient l’ami d’un autre grand intellectuel, Richard Hurrell Froude, qui exerce une grande influence sur lui. Il explique : Froude « m’apprit à regarder avec admiration l’Église de Rome et par là même à me détacher de la Réforme. Il grava profondément en moi l’idée de la dévotion à la Sainte Vierge et m’amena graduellement à croire en la Présence réelle. »

Un de ses amis lui conseille de lire les Pères de l’Église. Il s’y consacre avec passion entre 1826 et 1832. Cette année-là, il entame un voyage en Méditerranée, il visite Rome, Naples, la Sicile où il tombe gravement malade. Il croit même mourir. C’est l’occasion d’une nouvelle conversion où il reconnaît ce qu’il appelle « l’amour sélectif » de Dieu pour lui. Guéri, il retourne en Angleterre.

C’est à ce moment de sa vie qu’il lance ce qu’on a appelé le mouvement d’Oxford car ses membres appartiennent pour la plupart à l’Université d’Oxford. Le but de ce mouvement est de démontrer la légitimité de l’Église anglicane dans la succession apostolique. À cette époque, Newman et ses compagnons sont insatisfaits de l’Église anglicane qu’ils trouvent ronronnante, sans grand projet pastoral, et surtout complètement contrôlée par l’état. Comment l’Église peut-elle être dirigée par l’état ? Pour nourrir sa réflexion, le mouvement d’Oxford revient aux sources du christianisme. La réflexion se porte sur la phrase du Credo : « je crois en l’Église une, sainte, catholique et apostolique ». Newman est convaincu que, contrairement aux Luthériens et aux Calvinistes, l’Église anglicane n’est pas en rupture avec l’Église catholique et ce que disent les Pères de l’Église. Il se pose aussi la question : si les Pères de l’Église revenaient parmi nous, dans quelle Église se sentiraient-ils chez eux… Une question dangereuse !

Pour faire connaître son travail, le mouvement d’Oxford publie des tracts qui sont diffusés d’abord chez les étudiants, puis rapidement dans tout le pays. Au départ, il n’y a pas chez Newman de désir de devenir catholique. Mais ses positions suscitent l’opposition des évêques anglicans. En particulier son dernier tract, le tract 90, est vigoureusement condamné par la hiérarchie. Dans ce tract, Newman analyse la compatibilité des 39 articles de base de l’anglicanisme avec la foi catholique et il conclut à leur totale compatibilité. Avec cette condamnation, il est obligé de démissionner de ses différents postes. Il prononce son dernier sermon anglican le 18 septembre 1843. Entre temps, il doute de plus en plus de l’Église anglicane dont il remarque les similitudes avec les positions semi-ariennes qu’il a découvertes dans ses études de l’arianisme, entre autres en lisant et travaillant saint Athanase d’Alexandrie. Lui qui a maintes fois critiqué l’Église catholique s’en rapproche de plus en plus, mais il sait qu’il a tout à perdre dans ce rapprochement.

Il franchit le pas le 9 octobre 1845 : il devient catholique et est accueilli par un père passionniste italien, le père Dominique Barberi. Plusieurs de ses amis du mouvement d’Oxford le suivent dans sa conversion qui a un retentissement énorme en Angleterre car Newman est un intellectuel en vue dans le pays. Évidemment la polémique fait rage : Newman est critiqué tant du côté anglican que du côté catholique, où on voit cette conversion avec suspicion. Sa dernière œuvre du moment Essay on the Development of Christian Doctrine est condamnée par les évêques catholiques américains. Newman est abandonné de tous : ses amis, sa famille… Il perd aussi tous ses moyens de subsistance. Il faut un certain courage pour se convertir de la sorte !

Newman part à Rome où il rencontre le pape Pie IX. Il étudie pour être ordonné prêtre catholique. L’ordination a lieu le 30 mai 1847.  Il reçoit les ordres sacrés des mains du cardinal Giacomo Filippo Fransoni, préfet de la Congrégation pour la propagation de la foi. À Rome, Newman cherche aussi à se rattacher à une congrégation ou à un groupe de prêtre. Il découvre l’Oratoire de saint Philippe Neri et décide, avec la bénédiction du pape, de fonder l’Oratoire en Angleterre après un noviciat réduit à 3 mois. La première fondation est établie à Maryvale le 2 février 1848.

Entre 1852 et 1857, Newman est à Dublin pour fonder une université catholique à la demande des évêques irlandais. Mais là aussi, il rencontre des oppositions et doit démissionner. Je vous passe d’autres épisodes difficiles de sa vie, pour arriver à un moment clé : la publication en 1864 de son œuvre autobiographique Apologia Pro Vita Sua. Newman réagit à des bruits qu’on a fait courir sur lui selon lesquels il serait revenu à l’anglicanisme. Dans cet ouvrage, il décrit la recherche de la vérité qui l’a amené à devenir catholique. C’est un énorme succès. Beaucoup de catholiques découvrent la démarche de Newman et le soutiennent. Même du côté anglican, certains de ses anciens amis renouent avec lui.

Le grand rêve de Newman est de fonder l’Oratoire à Oxford. Il fait diverses tentatives qui rencontrent de fortes oppositions. Lorsque, finalement, la voie est libre, on interdit à Newman d’y participer. En fait, il y a de nouveau eu des dénonciations à Rome. On le suspecte d’hérésie. Lorsque Rome comprend que Newman est la victime innocente d’une machination, le pape l’invite à participer au premier Concile du Vatican, mais il décline l’invitation. C’est au cours de ce Concile qu’est promulgué le dogme de l’infaillibilité papale. Newman s’oppose à l’adoption de ce dogme, non pas parce qu’il ne croit pas à cette infaillibilité, mais parce qu’il craint qu’elle soit un obstacle pour la conversion des anglicans au catholicisme.

En 1870, il publie un de ses chefs d’œuvre, la Grammaire de l’assentiment, où il défend la foi avec des arguments très originaux.

À la fin de sa vie, Newman reçoit deux reconnaissances qui le touchent beaucoup. La première est d’être nommé en 1878 ‘Honorary Fellow’, c’est-à-dire membre honoraire, de son collège à Oxford dont il avait dû démissionner 35 ans plus tôt. La seconde, c’est d’être nommé cardinal en 1879 par le pape Léon XIII, à peine arrivé sur le trône pontifical. Il choisit comme devise Cor ad Cor loquitur, le cœur parle au cœur, devise qui, comme l’a dit Benoît XVI lors de la messe de béatification, « nous donne une indication sur la manière dont Newman comprenait la vie chrétienne : un appel à la sainteté, expérimenté comme le désir profond du cœur humain d’entrer dans une intime communion avec le Cœur de Dieu. » Newman se rend à Rome, mais il y tombe malade. Quand on croit qu’il est guéri, il rentre en Angleterre, mais subit une rechute et meurt le 11 août 1890, à l’âge de 89 ans.

John Henry Newman a été toute sa vie chercheur de Dieu, assoiffé de vérité. Pas étonnant qu’une sainte Edith Stein, elle-même passionnée de vérité, ait traduit en allemand une de ses œuvres. Newman a aussi été un grand défenseur de la juste articulation entre foi et raison. Voici ce que disait Benoît XVI, toujours à la messe de béatification :

« Le service particulier auquel le bienheureux John Henry a été appelé consistait à appliquer son intelligence fine et sa plume féconde sur les nombreuses et urgentes “questions du jour”. Ses intuitions sur le rapport entre foi et raison, sur la place vitale de la religion révélée dans la société civilisée, et sur la nécessité d’une approche de l’éducation qui soit ample en ses fondements et ouverte à de larges perspectives ne furent pas seulement d’une importance capitale pour l’Angleterre de l’époque victorienne, mais elles continuent à inspirer et à éclairer bien des personnes de par le monde. »

Pour terminer, permettez-moi de vous dire encore deux choses : saint John Henry Newman est aussi vénéré comme un saint dans l’Église anglicane où il est fêté le 11 août. Je trouve que cet fait méritait d’être souligné. Ensuite, il y a de plus en plus de voix qui s’élèvent dans l’Église pour demander que Newman soit déclaré docteur de l’Église. Quelle reconnaissance ce serait pour un converti au catholicisme de devenir docteur de l’Église ! Je confie cela à votre prière !

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