Du 26 au 29 septembre, le pape François était en visite d’Etat au Luxembourg et en Belgique. Un voyage riche en rencontres mais émaillé de diverses polémiques. Rencontre à l’Université Catholique de Louvain-la-Neuve, rencontre d’une quinzaine de personnes victimes de violences sexuelles dans l’Eglise, rencontre surprise des jeunes au Festival « Hope Happening », et célébration de la messe dimanche au Stade Roi Baudoin.
Retour sur ce voyage du pape au cœur de l’Europe avec Jacques Galloy, directeur de RCF Belgique.
« La première chose qui me marque – déclare Jacques Galloy – c’est la hauteur de vue du pape François : il nous a fait réfléchir au sens de la vie et de la mort, d’abord en embrassant de nombreux enfants, en allant prier sur la tombe du Roi Baudoin, symbole de la lutte contre l’avortement. Mais aussi lorsqu’il a condamné par deux fois le commerce lucratif des armes à Luxembourg et appelé à un cessez-le-feu dans les nombreuses zones de guerre, notamment au Proche-Orient. Il a eu un discours pour la vie au sens large. Même lorsqu’il a exprimé sa honte concernant les abus sexuels qui tuent des personnes. »
En effet, le pape François a rencontré pendant deux heures quinze personnes victimes de violences sexuelles dans l’Eglise. Il a déclaré que l’Eglise devrait « avoir honte et demander pardon ». Ce qui fut fait d’ailleurs quelques jours plus tard à Rome, lors de la veillée pénitentielle d’ouverture du synode sur la synodalité. Lors de la messe au stade Roi Baudoin dimanche matin, en présence de près de 40 000 personnes, le pape François a demandé avec fermeté : « Il y a de la place dans l’Église pour tous, tous, tous, mais nous serons tous jugés et il n’y a pas de place pour l’abus, pas de place pour la couverture de l’abus. Je le demande à chacun : ne couvrez pas les abus ! Je demande aux évêques : ne couvrez pas les abus ! Condamner les abuseurs et les aider à guérir de cette maladie qu’est l’abus. Le mal ne doit pas être caché : le mal doit être révélé au grand jour, il doit être connu, comme certaines personnes abusées l’ont fait, et avec courage. Que cela se sache. Et que l’abuseur soit jugé. Que l’abuseur soit jugé, laïc, prêtre ou évêque : qu’il soit jugé. » Des paroles que la foule a saluées par des applaudissements nourris.
François s’est également rendu à l’Université Catholique de Louvain-la-Neuve qui fêtait son 600ème anniversaire. Une étape difficile de son voyage comme le raconte Jacques Galloy, avec beaucoup de tristesse : « On a vu que le monde universitaire n’avait plus les éléments de langage pour comprendre ce qu’a dit le pape. Le pape François s’est fait en quelque sorte crucifier pour avoir rappelé des fondements anthropologiques comme la complémentarité homme-femme. Mais d’un autre côté, on peut dire aussi que le pape n’a pas trouvé les mots pour toucher les cœurs. » Avant d’ajouter : « C’est dommage qu’un voyage aussi magnifique soit entaché par des mots malheureux que le monde n’est plus capable de décoder et de comprendre. »
La Belgique, comme la France d’ailleurs, explique Jacques « est un pays où le tissu chrétien a eu une fécondité sociale exceptionnelle : à travers les écoles, les hôpitaux… Des œuvres qui sont aujourd’hui diluées dans l’esprit du monde et éloignées de l’évangile. Il faut remettre de l’évangile au cœur des œuvres sociales chrétiennes. »
Autre temps fort de ce voyage, la rencontre, samedi matin, dans la basilique de Koekelberg, de près de 3200 personnes engagées dans l’Eglise. A qui le pape a rappelé sa vision d’une Eglise « qui ne ferme jamais ses portes. Fixons cela dans notre cœur : jamais Dieu ne retire son amour pour nous. “Mais Père, même lorsque j’ai commis quelque chose de grave ?”. Jamais Dieu ne retire son amour pour toi. »
François est, à plusieurs reprises, sorti du programme officiel comme lorsqu’il est allé prenre un petit-déjeuner samedi matin avec des personnes en situation de précarité. Autre pas de côté : samedi soir, François a fait la surprise aux 5650 jeunes de 12 à 30 ans, réunis à Bruxelles pour le Festival « Hope Happening », de venir partager un moment avec eux. Son arrivée sur scène a déclenché une ovation et beaucoup de joie. Il leur a adressé quelques mots : « Si un jeune est fatigué, il lui manque la jeunesse. Je vous conseille d’aller de l’avant. Faites du bruit mais en gardant toujours le Seigneur à l’esprit ».
« C’est un des autres aspects de ce voyage qui m’a marqué » témoigne Jacques : « Ce pape est proche des gens. C’est un pape généreux venu adresser un message d’espérance à l’Europe. Luxembourg et Bruxelles sont des capitales européennes. Donc, il a parlé à l’Europe, depuis la Belgique : « ce minuscule pays et ce grand exemple. » Il a fait appel à l’histoire de notre pays qui a connu sur son territoire de multiples guerres : « Cette terre qui a vu tant de batailles et a vu ressortir l’effort de la construction européenne. » Ce pape, pro-européen, nous a appelés à travailler pour la paix en rappelant aux belges leur vocation à être une mini-Europe. »
Un voyage riche et dense “qui a apporté beaucoup de joie dans le cœur des catholiques”, conclut Jacques Galloy sobrement.