Connaître vraiment Jésus est la clé pour devenir pleinement soi-même. C’est la promesse du livre Pour vous qui suis-je ?, un parcours à la suite de 5 personnages de la Bible. Explications de l’auteur, le Père Dominique Janthial, prêtre du diocèse de Malines-Bruxelles.
Votre ouvrage propose de « rencontrer Jésus et se découvrir soi-même ». Que veut dire « rencontrer » Jésus aujourd’hui ? N’est-ce qu’un langage symbolique ?
Jésus n’est pas un grand personnage du passé. La foi chrétienne le proclame vivant. Mais il y a plus : Jésus est vrai Dieu et vrai homme. De ce fait, tout ce qu’il a vécu comme homme durant sa vie terrestre était uni à sa divinité et, par le biais de celle-ci, communiqué à toutes les dimensions du temps et de l’espace. Car Dieu est contemporain de tous les temps et présent à tous les lieux. C’est pourquoi nous pouvons être rendus présents à chaque scène de la vie de Jésus. De manière réelle ! C’est la grande intuition de Saint Ignace qui nous invite à utiliser notre imagination pour nous rapprocher de la réalité. D’habitude notre imagination nous éloigne plutôt de la réalité. Dans les exercices spirituels, par exemple, si nous nous imaginons dans la scène de Jésus qui rencontre Zachée, nous accédons grâce à notre imagination à une réalité qui d’ordinaire nous est voilée. Par l’instrument de sa divinité, l’homme Jésus nous est contemporain !!!
Quelles sont les étapes du chemin que vous proposez pour faire cette rencontre ?
Dans un précédent ouvrage, j’avais proposé un voyage à travers le Premier Testament : Devenir enfin soi-même à la suite des grands hommes du Premier Testament. Il s’agissait de se laisser inspirer par la vie de sept grandes figures, correspondant chacune à une étape de l’alliance : Adam, Abraham, Moïse, Samuel, David, Isaïe et Job. Dans le présent opuscule, ce sont cinq rencontres de Jésus avec deux femmes et trois hommes : Zachée, la Samaritaine, Pierre, Marie-Madeleine, Paul. Au fil de ces rencontres se dessine un itinéraire que nous sommes invités à suivre : ça commence par le fait de reconnaître que nous sommes perdus (c’est un peu osé de commencer par là mais lisez la rencontre avec Zachée et vous comprendrez !) et puis quatre autres étapes pour finalement pouvoir dire avec Saint Paul : “Pour moi, vivre c’est le Christ !”
A quoi fait référence la question « pour vous qui suis-je ? » que vous avez choisie comme titre ?
C’est la question que Jésus pose à Pierre dans ce dialogue qui aboutit à ce qu’on appelle la profession de foi de Pierre. C’est une question très étonnante ! Jésus se préoccupe-t-il de ce que l’on pense de lui ? N’est-il pas au dessus de cela ? Oui certainement, et il tient le secret de son être, de son identité du Père qui à chaque instant lui redit: “Tu ES mon fils.” Il faut lire la question autrement : Qui suis-je pour vous ? L’être de Jésus n’est pas pour lui-même mais pour son Père et pour nous. En lisant la rencontre de Jésus avec Pierre on découvre comment, le Seigneur dans ce dialogue qui commence par cette question “pour vous qui suis-je ?” va permettre à Pierre de découvrir qui il est profondément, sa véritable identité: “Tu ES Pierre!” C’est l’objectif, un peu ambitieux, de ce petit livre : nous permettre de découvrir QUI nous sommes.
Quel lien entre Paray-le-Monial, lieu ou la rencontre avec le Christ vivant est primordiale, et votre livre ?
Partir en pèlerinage dans un lieu comme Paray-le-Monial permet de refaire la démarche fondamentale du croyant, dont Abraham est le père. Dieu a dit à Abraham : “Va pour toi !” (Gn 12,1). Et Abraham a quitté son cadre habituel (son pays, sa parenté et la maison de son père) et il a commencé cette vie en alliance avec Dieu. Donc le pèlerinage est une démarche essentielle. De plus à Paray-le-Monial, c’est le cœur de Jésus qui nous accueille. Ce cœur à la fois humain et divin nous invite à retrouver notre propre cœur. C’est une expérience bouleversante et je souhaite que mon livre permette à ceux qui ont fait cette expérience de la décanter, d’en percevoir la richesse des implications que cela comporte et qu’il permette à ceux qui ne l’ont pas faite de la préparer, de la désirer, de ne pas en avoir peur parce qu’on comprend mieux ce qui se passe en nous quand on rencontre le Christ. Il ne nous prend rien, il nous redonne au contraire à nous-mêmes.
Quelle est la visée de votre livre ?
Je pense qu’il faut évangéliser l’intelligence, pas seulement la sensibilité. Parler le langage de la raison, faire réfléchir, cela permet de faire tomber beaucoup de peurs. Évidemment, on court toujours le risques en faisant celas de rester au niveau de l’intelligence : un jeune qui avait lu mon précédent livre déclarait volontiers que cela avait éclairé sa vie (il disait même “changé sa vie”) mais qu’il n’avait pas besoin du Christ ou de Dieu pour cela… Bon… C’est la liberté de chacun de faire descendre les choses de la tête au cœur, de risquer la rencontre.
Avez-vous vécu une expérience de rencontre avec Dieu qui a été un déclic pour écrire Pour vous qui suis-je ?
Oui j’ai rencontré le Christ vivant et agissant dans ma vie il y a bien longtemps alors que j’étais encore étudiant. Cela a été tellement bouleversant que j’ai voulu consacrer toute ma vie à le faire connaître. Très concrètement l’occasion de produire ces réflexions, fut des sessions ou des retraites données à des publics très divers en âge, nombre et même nationalité. Ayant eu beaucoup de retours sur la puissance de ces parcours pour vaincre des fonctionnements enkystés et destructeurs pour soi et pour l’entourage, je me suis décidé à écrire le premier, puis le deuxième livre.
Extraits du livre
Luc 19, 1-10 : Jésus était entré dans Jéricho et traversait la ville. Or, un homme riche appelé Zachée, chef des collecteurs d’impôts, cherchait à voir qui était Jésus, mais il n’y parvenait pas à cause de la foule, car il était de petite taille. Il courut en avant et monta sur un sycomore pour voir Jésus, parce qu’il devait passer par là. Lorsque Jésus fut arrivé à cet endroit, il leva les yeux, [le vit] et lui dit : « Zachée, dépêche-toi de descendre, car il faut que je m’arrête aujourd’hui chez toi. » Zachée s’empressa de descendre et l’accueillit avec joie. En voyant cela, tous murmuraient en disant : « Il est allé loger chez un homme pécheur. » Mais Zachée, se tenant devant le Seigneur, lui dit : « Seigneur, je donne aux pauvres la moitié de mes biens et, si j’ai causé du tort à quelqu’un, je lui rends le quadruple. » Alors Jésus dit à son propos : « Le salut est entré aujourd’hui dans cette maison, parce que lui aussi est un fils d’Abraham. En effet, le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu. »
Questions et exercices
Relire le texte de Lc 19, 1-10 et exercer son imagination pour « se mettre » dans la scène : situer le sycomore (en cherchant éventuellement une image sur Internet) ; regarder Zachée qui en escalade les branches inférieures puis s’installe pour observer sans être vu ; sursauter avec lui en entendant l’interpellation qui lui est adressée ; descendre et se jeter aux pieds de Jésus ; entendre les commentaires de ceux qui se croient justes (sans que cela n’altère la joie) ; parler à Jésus.
• Quelle est l’image de Dieu que je porte en mon coeur ? Est-ce un Dieu concurrent de l’homme ? Exigeant ? Tyrannique et qui veut me limiter dans ma liberté ? Ou bien Dieu est-il mon allié ?
• Entendre cette parole que Jésus m’adresse personnellement : « Le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu. » La laisser résonner.
• Identifier dans ma vie ce qui est perdu. Comment me suis-je laissé égarer ? Que puis-je dire de mes loyautés familiales ?
• Laisser résonner l’appel adressé à Abraham : « Va pour toi ! Quitte ton pays, ta patrie, la maison de ton père. Va vers le pays que je te montrerai. »
• Que suis-je prêt à lâcher pour retrouver la bonne route, pour me retrouver moi-même ?
Introduction : Avouons-le : le succès des réseaux sociaux repose en grande partie sur la capacité qu’ils nous offrent, comme à monsieur Tout-le-monde, d’avoir soudain des disciples – pardon ! des followers. Il est incontestablement assez grisant de se sentir soudain devenir un « influenceur » en regardant monter progressivement le nombre de ceux qui nous suivent sur Instagram ou sur Twitter. Cela ne coûte pas grand-chose : juste quelques clics ! Mais nous sommes-nous demandé ce qui se cachait derrière cette frénésie à vouloir faire école ? Ne serait-ce pas une manière de se rassurer à bon compte, nous cachant à nous-mêmes le fait qu’en réalité nous sommes perdus ? Lorsque j’étais aux États-Unis, certains automobilistes avaient apposé avec humour sur leur hayon arrière un autocollant qui portait : « Don’t follow me, I am lost too. » Tout le monde n’a pas cette honnêteté, malheureusement… Il est peu vraisemblable que Jésus de Nazareth – ou plutôt de Capharnaüm, puisque c’est là qu’il s’est installé chez son ami Pierre depuis le début de sa vie publique – tînt un compte précis de ses disciples. Mais les apôtres le feront à certains moments comme lors de la multiplication des pains, prétextant des problèmes d’intendance : « environ cinq mille hommes, sans les femmes et les enfants » (Mt 14, 21). Ainsi, les foules suivent Jésus dans ses déplacements – et Jésus se déplacera beaucoup pendant les trois dernières années de sa vie. Il parcourt la Galilée et les régions voisines, mais aussi, comme de nombreux Juifs pieux, il se rend deux à trois fois par an avec ses disciples à Jérusalem pour y célébrer les fêtes dites « de pèlerinage » : Pâques, Pentecôte et la fête des Tentes.
Un certain fils d’Adam, nommé Zachée La rencontre de Jésus avec Zachée se situe lors d’une de ces montées à Jérusalem. En l’occurrence, il s’agit de la dernière étape de son voyage, mais aussi de l’ultime étape de son parcours terrestre, avant ce qu’il vient d’annoncer une nouvelle fois à ses disciples : sa mort et sa résurrection à Jérusalem. Il a vraisemblablement prévu de se reposer dans cette bourgade que la chaleur rend parfois très inhospitalière, mais qui offre à la fin de l’hiver une halte agréable à l’ombre des palmiers. Aux abords de Jéricho, juste avant d’entrer dans la ville, Jésus vient de poser un signe particulièrement frappant. Un aveugle a retrouvé la vue. Sans doute la nouvelle de cette guérison a-t‑elle été plus vite que Jésus. Avec son cortège de disciples, il devait mettre du temps à se déplacer. Un certain Zachée en a eu connaissance et veut voir de ses yeux celui qui a réalisé un tel miracle. La foule s’étant densifiée, il avise un sycomore qui lui tend ses branches basses et grimpe aisément à une hauteur suffisante pour apercevoir le fameux rabbi. Nous savons très peu de chose sur ce Zachée si ce n’est sa profession – collecteur d’impôts –, sa fortune – il est riche – et son prénom – d’une origine hébraïque indubitable, mais dépourvu de résonance biblique significative1. Contrairement à l’habitude orientale, le nom de son père n’est pas accolé au sien. Il n’est pas appelé Zachée Ben Untel ; la seule certitude que nous ayons au départ c’est donc qu’il est un être humain. Il est simplement Zachée Ben Adam, un fils d’Adam, comme nous…