A l’occasion de la sortie de l’album « Les Chants de Jésus » par l’ensemble vocal Schola Regina, dirigé par Philippe Nikolov, nous avons rencontré Max Guazzini, producteur et directeur artistique, et Jean-François Léost, membre de la Communauté de l’Emmanuel, qui a écrit et composé deux des chants repris dans cet opus : Plus près de toi et Mon Père, je m’abandonne à toi.
Après deux albums, Credo en 2011 et Les Chants de Marie en 2015, Max Guazzini tenait à produire un album qui parle de Jésus et permette de découvrir des chants populaires : « Avec Philippe Nikolov, chef de chœur de Ste Jeanne de Chantal, nous avons voulu rassembler des chants de toute sensibilité musicale et liturgique : il y a donc du grégorien, des chants de Noël, des chants de Lucien Deiss que l’on chantait autrefois, dans les églises, et des chants de l’Emmanuel. Quel plaisir ce mélange des styles ! »
« Pour moi, le chant est l’expression d’une communion. »
Un mélange des styles mais aussi un mélange de voix : « Tous les chants sont chantés par une chorale, l’ensemble vocal Schola Regina. Parce que pour moi le chant c’est une communion. J’aime l’idée que toute l’assemblée puisse participer et être un peuple qui acclame son Dieu en communion. »
La sélection des chants s’est faite sur un critère populaire, il s’agit donc de chants déjà largement connus, mais aussi à partir d’une dimension affective : « Le chant Mon Père, je m’abandonne à toi, me touche particulièrement. J’ai été, pendant 18 ans, président du Stade Français de Rugby, et l’un de mes joueurs, dont j’étais très proche, Christophe Dominici, est décédé il y a bientôt deux ans. A ses obsèques, le chœur de Grenelle a admirablement chanté Mon Père, je m’abandonne à toi. Reprendre ce chant dans l’album est une forme d’hommage. Quant à Plus près de toi, alors que je l’écoutais à la maison, une amie qui était là , s’est mise à pleurer, tant elle était touchée par les paroles et la mélodie. »
Les chants ont une histoire, depuis leur composition, jusqu’à leur écoute dans des moments importants et marquants de nos vies. Jean-François Léost a écrit Plus près de toi en 1998. Il est alors étudiant à l’école d’évangélisation de Paray-le-Monial, joue de la guitare depuis deux ans à peine. D’un naturel plutôt réservé, c’est à l’invitation du père Francis Manoukian, prêtre accompagnateur de l’école d’évangélisation, qu’il se lance : « Le père Manoukian m’a dit : tu as un talent musical, mets-le au service de l’évangélisation. » Il consacre alors le temps de préparation aux missions d’évangélisation à composer et écrire. Lors d’un cours sur les pères de l’Eglise, il est touché par un texte de St Augustin : « Tu nous a fait pour toi et notre cœur est sans repos tant qu’il ne repose en toi… C’était exactement ce que j’expérimentais à ce moment-là  : dès que j’étais en prière, avec le Seigneur, j’étais dans le repos, et dès que je sortais de la prière, j’étais dans les questionnements et dans l’agitation : qu’est-ce que je vais faire après l’école d’évangélisation, quelle est ma vocation ?  Je découvrais que lorsque j’étais avec le Seigneur, non seulement j’étais à ma place, mais bien plus, j’étais fait pour cela ! Ma première vocation, c’est d’être proche du Seigneur. » Ensuite, tout s’est enchaîné, la mélodie, le refrain, le premier couplet. Immergé dans sa composition, Jean-François écrira les trois couplets suivants pendant un cours…
Ces mots peuvent aussi nous tourner vers la perspective de la vie éternelle : « Ces paroles de St Augustin m’ont aussi fait toucher aux limites de ma condition humaine : quoi que je vive, il y a quelque chose qui me manque et je ne serai pleinement comblé que dans la vie éternelle, lorsque je serai face à Dieu et en Dieu. »
Trois ans plus tard, en 2001, alors qu’il fait son service militaire et continue de se questionner professionnellement et sur sa vocation, Jean-François prie régulièrement la prière d’abandon de Charles de Foucauld, presqu’une prière familiale : « J’ai une tante religieuse, sœur de la Consolation à Draguignan, qui porte l’habit de Charles de Foucauld et qui récite cette prière tous les jours. Cette prière a donc baigné mon enfance et mon adolescence. A cette période particulière de discernement et d’incertitude, elle m’a rejoint et porté. Alors que je passe plusieurs semaines chez des amis à Grenoble, sans ma guitare, pour chercher du travail, je compose ce chant sur le piano familial. A postériori, je peux témoigner que cette prière a porté du fruit : elle m’a donné la paix et la confiance en Dieu pour traverser cette période délicate : Dieu est mon Père et tout ce qu’il fait pour moi est bon, même si les choses ne semblent pas aller dans le sens que je veux. »
« Ces chants sont devenus le bien commun de l’Eglise. »
De la composition en solitaire à la diffusion puis la reprise du chant par d’autres, Jean-François, qui a cédé ses droits d’auteur à la Communauté de l’Emmanuel, reconnait que ses chants ne lui appartiennent plus : « Il y a une dépossession c’est vrai. Je suis toujours très touché de les entendre chantés ou repris. J’ai découvert une magnifique version de Plus près de toi, chantée en égyptien. Ces chants sont devenus le bien commun de l’Eglise. »