Œcuménisme, que dit l’Eglise ?

La collaboration des différentes confessions chrétiennes dans l’annonce de l’Evangile est particulièrement importante pour l’Eglise catholique. Retour sur 2 textes importants qui redisent l’importance de la collaboration œcuménique et son cœur qui est de garder Jésus pour phare et pour destination.

L’urgence d’une collaboration œcuménique pour annoncer le Christ

Ce texte du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens (le Directoire pour l’application des principes et des normes de l’œcuménisme), et approuvé par Jean Paul II date de 1993. Mais il reste d’actualité et peut nous inspirer. Extraits.

205. Le témoignage commun donné par toutes les formes de collaboration œcuménique est déjà missionnaire. Le mouvement œcuménique, de fait, est allé de pair avec une nouvelle découverte, par bien des communautés, de la nature missionnaire de l’Église. La collaboration œcuménique fait voir au monde que ceux qui croient dans le Christ et vivent par son Esprit, étant devenus enfants de Dieu qui est Père de tous, peuvent entreprendre de surmonter, avec courage et espérance, les divisions humaines même dans des matières aussi délicates que la foi et la pratique religieuse. Les divisions qui existent parmi les chrétiens sont certainement un obstacle majeur au succès de la proclamation de l’Évangile. Mais les efforts qui ont été faits pour les vaincre font beaucoup pour compenser le scandale et donner de la crédibilité aux chrétiens qui proclament que le Christ est celui en qui toutes les personnes et toutes les choses sont rassemblées dans l’unité : « Comme évangélisateurs, nous devons offrir aux fidèles du Christ, non pas l’image d’hommes divisés et séparés par des litiges qui n’édifient point, mais celle de personnes mûries dans la foi, capables de se rencontrer au-delà des tensions réelles grâce à la recherche commune, sincère et désintéressée de la vérité. Oui, le sort de l’évangélisation est certainement lié au témoignage d’unité donné par l’Église. Voilà une source de responsabilité mais aussi de réconfort ».1

206. Le témoignage œcuménique peut être donné dans l’activité missionnaire elle-même. Pour les catholiques, les bases de la collaboration œcuménique avec les autres chrétiens en mission sont : « le fondement du baptême et le patrimoine de foi qui nous est commun ».2 Les autres Églises et Communautés ecclésiales qui conduisent les fidèles à la foi dans le Christ Sauveur et dans le baptême au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, les conduisent dans la communion réelle, bien qu’imparfaite, qui existe entre eux et l’Église catholique. Les catholiques voudraient beaucoup que tous ceux qui sont appelés à la foi chrétienne se joignent à eux en cette plénitude de communion qui, selon leur foi, existe dans l’Église catholique, et pourtant ils reconnaissent que, dans la Providence de Dieu, certains passeront toute leur vie chrétienne dans des Églises ou des Communautés ecclésiales qui n’assurent pas cette pleine communion. Ils veilleront à respecter soigneusement la foi vivante des autres Églises et Communautés ecclésiales qui prêchent l’Évangile, et se réjouiront de ce que la grâce de Dieu est à l’œuvre parmi eux.

207. Les catholiques peuvent se joindre aux autres Églises et Communautés ecclésiales – pourvu qu’il n’y ait rien de sectaire ou de délibérément anti-catholique dans leur travail d’évangélisation – dans des organisations et des programmes qui apportent un soutien commun aux activités missionnaires de toutes les Églises participantes. Un des objectifs particuliers d’une telle collaboration sera d’assurer que les facteurs humains, culturels et politiques qui étaient impliqués dans les divisions originelles entre les Églises et qui ont marqué la tradition historique de séparation, ne soient pas transplantés dans des lieux où l’Évangile est prêché et où des Églises sont fondées.
Ceux qui ont été envoyés par des Sociétés missionnaires, pour aider à la fondation et à la croissance de nouvelles Églises, seront particulièrement sensibles à cette nécessité. Les évêques pourraient y porter une attention spéciale. C’est aux évêques qu’il revient de déterminer s’il devient nécessaire d’insister de façon particulière sur des points de doctrine ou de morale à propos desquels les catholiques diffèrent des autres Églises et Communautés ecclésiales, et ces dernières pourront trouver nécessaire de faire de même à l’égard du catholicisme. Toutefois cela doit être fait, non dans un esprit agressif ou sectaire, mais dans l’amour et le respect mutuel.3 Les nouveaux convertis à la foi seront soigneusement élevés dans l’esprit œcuménique, « de telle sorte que, étant bannie toute apparence d’indifférentisme, de confusionnisme et d’odieuse rivalité, les catholiques collaborent fraternellement avec les frères séparés, selon les dispositions du décret sur l’œcuménisme, par une commune profession de foi en Dieu et en Jésus Christ devant les nations, dans la mesure du possible, et par une coopération dans les questions sociales et techniques, culturelles et religieuses ».4

208. La collaboration œcuménique est particulièrement nécessaire dans la mission auprès des masses déchristianisées de notre monde contemporain. La capacité pour des chrétiens encore divisés de donner un témoignage commun, dès maintenant, aux vérités centrales de l’Évangile5 peut être une invitation puissante à une estime renouvelée de la foi chrétienne dans une société sécularisée. Une évaluation commune des formes d’athéisme, de sécularisation et de matérialisme qui sont à l’œuvre dans le monde d’aujourd’hui, et une façon commune de s’en occuper seraient grandement profitables à la mission chrétienne dans le monde contemporain.

209. Il faut donner une place spéciale à la collaboration entre les membres de différentes Églises et Communautés ecclésiales, dans la réflexion, dont on a constamment besoin, sur le sens de la mission chrétienne, sur la manière d’engager le dialogue du salut avec les membres des autres religions et sur le problème général de la relation entre la proclamation de l’Évangile du Christ et les cultures et formes de pensée du monde contemporain. ¨

Le 25 mars 1993, Cardinal Cassidy, Président du Conseil pontifical pour l’unité des chrétiens

1. Evangelii Nuntiandi, n. 77.
2. Ibidem.
3. Cf. Ad Génies, n. 6.
4. Ibidem, n. 15.
5. Cf. Redemptor Hominis, n. 11.

« Faire passer notre frère avant nos peurs »

« Accueillons le désir profond de Jésus qui veut « que tous soient un » (Jn 17, 21) et, par sa grâce, marchons vers la pleine unité ! Que les Mages nous aident sur ce chemin. Regardons leur itinéraire. »

Homélie du pape François du mardi 25 janvier 2022 – 55e semaine de prière pour l’unité des chrétiens – Extraits

1. Tout d’abord, les Mages partent « d’Orient » (Mt 2, 1), car de là ils voient surgir l’étoile. […] Ces sages ne se contentent pas de leurs connaissances et de leurs traditions, mais ils désirent davantage. C’est pourquoi ils affrontent un voyage risqué, animés par l’inquiétude de la recherche de Dieu. Chers frères et sœurs, nous aussi, suivons l’étoile de Jésus ! […] Que notre regard soit fixé sur le Christ au Ciel, sur l’étoile de Jésus. Suivons-le, lui, son Évangile, son invitation à l’unité, sans nous préoccuper de la durée et de la difficulté du voyage pour atteindre pleinement cette unité. […] Désirons et marchons ensemble, en nous soutenant mutuellement, comme l’ont fait les Mages. […] En eux, nous pouvons voir le reflet de nos diversités, de nos traditions et expériences chrétiennes diverses, mais aussi notre unité naissant d’un même désir : regarder le Ciel et marcher ensemble sur la terre. Marcher. L’Orient nous fait aussi penser aux chrétiens qui habitent diverses régions ravagées par la guerre et la violence. Ces frères et sœurs qui sont les nôtres ont de nombreux défis difficiles à relever, mais, avec leur témoignage, ils nous donnent de l’espoir : ils nous rappellent que l’étoile du Christ resplendit dans les ténèbres et ne s’éteint pas ; que, de là-haut, le Seigneur accompagne et encourage nos pas. Autour de lui, dans le Ciel, brillent ensemble de nombreux martyrs, sans distinction(s) de confession : ils nous indiquent, à nous sur terre, une voie précise, celle de l’unité !

2. De l’Orient, les Mages arrivent à Jérusalem avec le désir de Dieu dans leur cœur, disant : « Nous avons vu son étoile se lever et nous sommes venus l’adorer » (v. 2). Mais du désir du Ciel, ils sont ramenés à la dure réalité de la terre : « Quand le roi Hérode entendit cela – dit l’Évangile – il fut troublé et tout Jérusalem avec lui » (v. 3). […]

Tout au long de notre chemin vers l’unité, il peut aussi arriver que nous nous arrêtions pour la même raison : le trouble, la peur. C’est la peur de la nouveauté qui ébranle les habitudes et les certitudes acquises ; c’est la peur que l’autre ne dérange mes traditions et mes schémas consolidés. Mais, à la racine, il y a la peur qui habite le cœur de l’homme dont le Seigneur ressuscité veut nous libérer. Laissons résonner sur notre chemin de communion son exhortation pascale : « N’ayez pas peur » (Mt 28, 5.10). Ne craignons pas de faire passer notre frère avant nos peurs ! Le Seigneur veut que nous nous fassions confiance les uns les autres et que nous marchions ensemble, malgré nos faiblesses et nos péchés, malgré les erreurs du passé et les blessures réciproques.

[…] Les Mages ne trouvent pas Jésus uniquement grâce à l’étoile, qui a entre-temps disparu ; ils ont besoin de la Parole de Dieu. Nous aussi, chrétiens, ne pouvons atteindre le Seigneur sans sa Parole vivante et efficace (cf. He 4,12). Elle a été donnée à tout le peuple de Dieu pour être accueillie, priée afin qu’elle soit méditée avec tout le Peuple de Dieu. Approchons-nous donc de Jésus par sa Parole, mais approchons-nous aussi de nos frères par la Parole de Jésus. Son étoile se lèvera à nouveau sur notre chemin et nous procurera de la joie.

3. C’est ce qui est arrivé aux Mages lorsqu’ils ont atteint la dernière étape : Bethléem. Ils entrent dans la maison, se prosternent et adorent l’Enfant (cf. Mt 2, 11). […] Ils deviennent ainsi un signe de prophétie pour nous, désireux du Seigneur, compagnons de voyage sur les routes du monde, chercheurs à travers l’Écriture Sainte des signes de Dieu dans l’histoire. Frères et sœurs, pour nous aussi, l’unité parfaite, dans la même maison, ne peut venir que de l’adoration du Seigneur. L’étape décisive du chemin vers la communion parfaite exige une prière plus intense, elle exige l’adoration de Dieu.

Mais les Mages nous rappellent que, pour adorer, il y a une étape à franchir : il faut d’abord se prosterner. C’est le chemin, s’incliner, mettre de côté ses propres prétentions pour ne laisser que le Seigneur au centre. Combien de fois l’orgueil a-t-il été le véritable obstacle à la communion ! […] S’abaisser, quitter, simplifier : demandons ce soir à Dieu le courage de l’humilité, seul moyen de venir adorer Dieu dans la même maison, autour du même autel. Les Mages nous rappellent aussi que c’est uniquement devant Dieu, dans sa lumière, que nous nous rendons vraiment compte des trésors que chacun possède, mais qui doivent être offerts et partagés. Ce sont en effet des dons que l’Esprit destine au bien commun, pour l’édification et l’unité de son peuple. Et nous en prenons conscience en priant, mais aussi en servant : lorsque nous donnons aux nécessiteux, nous offrons à Jésus qui s’identifie à celui qui est pauvre et aux marginalisés (cf. Mt 25, 34-40) ; et il nous unit entre nous.

Les dons des mages symbolisent ce que le Seigneur souhaite recevoir de nous. L’or, l’élément le plus précieux, parce que Dieu est à la première place. C’est vers lui que nous devons regarder, non vers nous ; faire sa volonté, pas la nôtre ; suivre ses voies, pas les nôtres. Si le Seigneur est vraiment à la première place, nos choix, même ecclésiastiques, ne peuvent plus être basés sur les politiques du monde, mais sur les désirs de Dieu. L’encens, pour rappeler l’importance de la prière qui monte vers Dieu comme une odeur agréable (cf. Ps 141, 2). Ne nous lassons pas de prier les uns pour les autres et les uns avec les autres. Enfin, la myrrhe, qui servira à honorer le corps de Jésus descendu de la croix (cf. Jn 19, 39), nous renvoie au soin de la chair souffrante du Seigneur, déchirée dans les membres des pauvres. Servons les nécessiteux, servons ensemble Jésus qui souffre !

Chers frères et sœurs, faisons comme les Mages qui sont rentrés chez eux « par un autre chemin » (Mt 2, 12). Oui, nous avons besoin de changer de voie, d’inverser le cours de nos habitudes et de nos convenances pour retrouver la voie que le Seigneur nous montre, la voie de l’humilité, la voie de la fraternité, de l’adoration.

Donne-nous, Seigneur, le courage de changer de direction, de nous convertir, de suivre ta volonté et non nos perspectives ; pour avancer ensemble, vers toi, qui avec ton Esprit veux nous unir. Amen.

Solennité de la Conversion de saint Paul apôtre, célébration des secondes vêpres, Basilique Saint-Paul-hors-les-murs

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