Nos amis Polonais nous parlent de l’accueil des Ukrainiens

Mirka est polonaise. Elle vit à 15 Km de Varsovie, au centre du pays. Avec son mari Arek, ils sont tous deux coordinateurs de la Communauté de l’Emmanuel en Pologne. Depuis ce jour tragique où la guerre a été déclarée en Ukraine, la Pologne est aux premières loges de l’aide concrète. Nous avons eu la chance de pouvoir lui parler pendant 1h par Skype mercredi 16 mars. Elle nous raconte ce qu’elle voit tous les jours.

"Ici, la mémoire de la guerre est encore très vive..."

Pouvez-vous nous parler de la réaction des Polonais face à la guerre en Ukraine ?

Ce qu’il faut d’abord comprendre, c’est que la mémoire de la guerre est encore très vive en Pologne. La mort de millions de personnes a laissé tellement de souffrances que nul ne peut être distant face à la situation de la guerre en Ukraine.

De plus, avant même la guerre, plus d’1 million d’Ukrainiens habitent et travaillent en Pologne. Nous en connaissons tous !

Enfin, lorsque vous entendez et voyez des bombes exploser à 20 km de chez vous comment rester insensible ? Cette guerre est à nos portes.

Vous, personnellement, qu’avez-vous fait ?

Toute la société polonaise a réagi immédiatement et spontanément : nous voulons aider ! Nous, notre mouvement naturel a été d’appeler les Ukrainiens que nous connaissons.

Nous avons un frère de Communauté qui est prêtre à Mosciska, tout près de la frontière polonaise. Il y a des gens, souvent des femmes avec leurs enfants, qui piétinent sur 40 kms pour passer la frontière et qui passent près de chez lui. En tant que paroisse, ils essayent d’aider les réfugiés en les hébergeant au presbytère, en leur servant des repas chauds, des sandwichs, du café et du thé. 

Personnellement, nous avons accueilli une femme avec des jumeaux. Elle loge dans la maison de ma sœur, qui habite aux Etats-Unis. Puis cette famille m’a parlé d’une famille amie qui arrivait également. Alors j’ai cherché des personnes autour de moi pour leur proposer un toit. Tous ceux qui en ont la possibilité accueillent quelqu’un aujourd’hui. C’est un magnifique élan de solidarité qui s’est mis en place naturellement et spontanément !

Ensuite, nous essayons de les accueillir du mieux possible. Ils ont tellement besoin d’être rassurés… Au-delà de leurs besoins matériels (vêtements, nourriture, …) ils ont besoin qu’on les prenne dans nos bras et qu’on les entoure. Souvent les femmes sont en grande dépression. Elles ont tout laissé derrière elles, à commencer par leurs maris. Alors, si elles sont reconnaissantes à la société polonaise de les accueillir, elles ne souhaitent qu’une seule chose : retourner chez elles, auprès d’eux. 

"Beaucoup de personnes âgées sont restées chez elles"

Comment pouvez-vous aider concrètement votre frère prêtre Andrzej ?

Au début, nous envoyions des Zlotys au Père Andrzej, qui ensuite les changeait. Mais comme le taux de change entre la Hryvnia (monnaie ukrainienne) et les Zlotys (monnaie polonaise) s’est considérablement dégradé, nous avons changé de méthode. Nous achetons les Hryvnia des réfugiés ukrainiens pour leur donner des Zlotys. Ensuite nous envoyons par colis l’argent à nos frères qui habitent près de la frontière, où ils retrouvent Andrzej. Comme ça c’est gagnant-gagnant !

Comme je vous le disais, Andrzej offre secours à des milliers de personnes qui attendent à la frontière. Il utilise donc une partie de l’argent pour acheter nourriture, café, thé, vêtements chauds… Mais il y a une autre réalité : souvent, les hommes sont partis à la guerre, les femmes et enfants ont fui, mais les personnes âgées sont restées chez elles. Il faut donc aller les visiter, vérifier qu’elles ne manquent de rien, et éventuellement les prendre en charge. C’est une situation terrible.

Et enfin, il envoie de l’argent chez des amis fiables qui vivent à l’Est, qui sont en contact direct avec la guerre, et qui décident de rester pour aider les malades et les blessés.

"Quand des invités viennent chez toi, c'est Dieu qui s'invite !"

Comment réagissent les polonais dans l’ensemble ?

Je crois que presque tout le monde prend sa part. Les gens prennent leur voiture pour aller à la frontière et recueillir des familles, d’autres attendent à la gare routière et font de même. Nous ne choisissons pas. Nous allons là où arrivent les Ukrainiens et nous leur proposons notre aide, sans sélection.

Le gouvernement a également mis en place de nombreuses mesures d’accueil : les réfugiés ont un accès gratuit aux transports (cela leur permet de ne pas rester près de la frontière), aux services de soin et de santé, et peuvent également bénéficier de cartes téléphoniques prépayées pour appeler chez eux. Il faut bien réaliser que la plupart des personnes n’ont rien. Elles ont fui en un clin d’œil, sans avoir la possibilité d’emporter quoi que ce soit.

Par ailleurs, des organisations s’occupent de ravitailler les familles, de leur procurer des vêtements. Les crèches, les écoles, les maisons de retraite ouvrent leurs portes pour accueillir tous ceux qu’ils peuvent. 

96 couvents à travers le pays ont également ouvert leurs portes aux réfugiés.

Un mot tout de même au sujet des jeunes : après 2 années de pandémie qui ont été si dures pour eux, aujourd’hui la guerre leur fait très peur. Le taux de dépression et de suicides chez les jeunes est énorme.

Et vous, avez-vous peur, Mirka ?

Non ! Moi je crois en Dieu !

Aujourd’hui nous essayons de vivre une vie normale, centrés sur ceux qui ont besoin de nous. Il y a une phrase polonaise qui dit “Quand des invités viennent chez toi, c’est Dieu qui s’invite”.

Bien sûr, nous savons que ça va être long et que nous allons être éprouvés sur la durée. Mais nous n’y pensons pas aujourd’hui. 

Tous les soirs nous prions le rosaire dans la rue, et nous disons une prière spécifique à la fin de chaque messe. La prière est notre arme !

Daily Rosary for peace

Tous les soirs à 19h, participez au chapelet international pour la paix sur Zoom. ➨ C’est ici

Daily Rosary for peace

A lire aussi

Le pape François consacre la Russie et l’Ukraine au cœur de Marie

Alors que le monde occidental est confronté à la guerre, le pape François s’apprête à consacrer la Russie et l’Ukraine au Cœur immaculé de Marie, le 25 mars 2022 à 17h. Une démarche qui répond aux demandes de la Vierge elle-même lors des apparitions de Fatima, en 1917.

Recommandez cet article à un ami

sur Facebook
par Whatsapp
par mail