Rien ne prédisposait Clémentine Beauvais, agnostique non baptisée, féministe 2.0, écolo végétarienne et autrice littérature jeunesse à succès, à enquêter sur sainte Marguerite-Marie Alacoque.
Clémentine narre avec humour sa découverte du monde catho et sa rencontre avec la sainte de Paray-le-Monial. Extrait.
Cet article est paru dans la revue Il est vivant! n°361
Par CLÉMENTINE BEAUVAIS
Certes, si on cherche à la suivre, et non pas seulement à la vivre, il faut s’administrer Marguerite-Marie à doses homéopathiques, incorporer des substances plus douces, plus contemporaines, un soupçon de romantisme, une pincée d’amour tel qu’on l’entend aujourd’hui ; bien mélanger pour enlever les grumeaux, prévenir avant dégustation qu’on risque de s’étouffer sur ce qu’il reste de morceaux, que certaines tranches risquent d’être un peu plus pimentées que les autres, qu’il faut le voir comme un résidu de recette ancienne, quand les fours avaient tendance à gratiner un peu trop.
Autre chose que je lis et qui m’irrite : le Sacré Cœur comme une sorte de métaphore. Je ne sais pas pourquoi, ça me démange particulièrement.
Wikipédia nous dit : « Le Sacré Cœur est une dévotion au cœur de Jésus Christ, en tant que symbole de l’amour divin par lequel Dieu a pris la nature humaine et a donné sa vie pour les hommes. »
Et mes notes de ronchonner : « Mais NON !!! C’est pas juste un SYMBOLE ! »
Je m’aperçois que je deviens plus royaliste que le roi avec cette histoire de cœur. Plus je lis que c’est un symbole, plus j’ai envie de rugir qu’un symbole ne te carbonise pas la poitrine 24 h/24 pour le reste de ta vie une fois qu’on t’a littéralement ouvert la cage thoracique pour le mettre dedans. Comme il est pratique de dire « c’est un symbole », ça empêche de montrer là où ça saigne réellement et crame les côtes.
En fait, j’ai bien plus de mal à croire au Jésus-qui-nous-donne-ce-cœur-comme-un-symbole qu’au Jésus pyromane de Marguerite-Marie tel qu’elle nous le raconte.
Un jour où je m’ennuie, je tape #margueritemariealacoque, #sacrécoeur, et autres hashtags similaires, sur Instagram.
Les photos carrées pleuvent, délicieusement kitschounettes. Marguerite-Marie demi-sourire de tranquille extase, yeux rivés sur un gentil Jésus de boys band, coeur arc-en-ciel chapeauté d’une petite flammèche du genre qu’un briquet Bic réussit à crachoter par jour de grand vent. J’ai envie de commenter : « Mais c’est quoi cette étincelle à deux balles ! Le coeur était littéralement en feu !!!
#incendie #brasier #fournaise #aïeouilleçabrûle. »

Sainte Marguerite-Marie et moi
Clémentine Beauvais
Quasar