« Le but est d’avancer ensemble »

Comment rendre attractif le catéchisme, confronté, dans leur paroisse, à une chute drastique des inscriptions ? Cette question a donné l’occasion à toute l’équipe pastorale d’expérimenter une forme de synodalité.

Propos recueillis par LAURENCE DE LOUVENCOURT

Stella Mercier – Responsable salariée de la catéchèse à la paroisse de Plaisir (78). Maman catéchiste (quatre années d’expérience). 3 enfants au catéchisme et éveil à la foi.

Dominique Barnérias – Curé de Plaisir (78). A fait sa thèse de théologie sur les paroisses dans les synodes diocésains français de 1983 à 2004. Enseigne à l’Institut catholique de Paris et au séminaire d’Issy-les-Moulineaux. Coauteur du Petit manuel de synodalité.

Il est vivant ! Vous avez vécu en paroisse une expérience assez synodale, en quoi a-t-elle consisté ?

Dominique Barnérias L’année dernière, dans le contexte de la pandémie, nous avons constaté que le nombre d’enfants inscrits au catéchisme chutait fortement. La catéchèse par petites équipes, prise en charge par les parents à tour de rôle, était un modèle qui ne fonctionnait plus. Les parents, souvent peu pratiquants, n’étaient pas à l’aise dans la transmission du contenu de la foi. C’était devenu un frein pour inscrire leurs enfants au catéchisme… M’est venue alors l’idée de placer la catéchèse au cœur de la vie de la paroisse, le dimanche matin, avec un accueil des adultes. Ce projet, proposé au conseil pastoral, a pris forme peu à peu grâce à tous les échanges qui ont suivi.

Comment avez-vous associé les paroissiens à l’élaboration de ce projet ?

DB Par exemple, j’avais imaginé au début que le dimanche matin où la catéchèse était proposée, il n’y aurait pas de messe, et ce, afin de faciliter l’accueil de parents loin de toute pratique. Mais la plupart des paroissiens consultés ont émis à l’inverse le souhait qu’une messe soit maintenue. Et il en est ainsi (à 9 h 15). De même, au début, je pensais accueillir parents et enfants à l’église, avant que ces derniers ne rejoignent les salles paroissiales situées à plusieurs centaines de mètres de l’église. Mais nous avons compris que ce n’était pas jouable.

Stella Mercier Au début, l’idée de la catéchèse le dimanche paraissait un peu vague. Mais en avançant petit à petit, nous nous sommes appuyés sur les points forts de ce projet et nous avons essayé de voir comment les développer concrètement.

DB Plusieurs équipes ont travaillé. Le conseil pastoral a émis des remarques, des idées et des préconisations. Puis une « équipe Projet » a été créée avec Stella et quelques autres personnes expérimentées en catéchèse, pour la “mise en musique” du projet. Par exemple, dans l’élaboration de la pédagogie destinée aux adultes et aux enfants, il a été décidé que le thème et le texte que les parents aborderaient à l’église seraient les mêmes (ou proches) de ceux abordés par leurs enfants.

SM Ces idées ont émergé à partir du projet initial, du parcours choisi, des contraintes rencontrées au long des dernières années de catéchisme (la fatigue des gens, la baisse du nombre de paroissiens et d’enfants au catéchisme, etc.). Il s’agissait de proposer un événement joyeux, un rassemblement où tout le monde se sente bien, où chacun puisse se ressourcer, rencontrer le curé et les paroissiens. En prenant en compte tous ces ingrédients, l’idée d’un rassemblement mensuel nous a semblé la plus appropriée. Nous avons aussi réfléchi au contenu de cette rencontre et l’accueil nous a semblé premier. Après que les adultes ont déposé leurs enfants, ils ont la matinée pour eux. Ils sont alors accueillis dans l’église par des paroissiens leur offrant thé ou café. Viennent ensuite louange, témoignage, prières fraternelles, partage, mises en scène de l’Évangile, lecture, explications, etc. Et après une bénédiction des familles, tout se termine par un apéro ! C’est très joyeux et attirant.

Cette prise de décision collégiale, est-ce une expérience renouvelable ?

DB L’enseignement de cette expérience, c’est qu’il faut du temps pour aboutir à un projet. Dès la fin 2020, je me projetais dans la rentrée 2021. Souvent, la tentation est de vouloir aller trop vite, et d’obtenir des résultats immédiats. Mais comme le dit le pape François, la synodalité, c’est un processus. Il y a des étapes à respecter. Ce qui prend du temps porte du fruit.

Y a-t-il eu des points de freinage dans ce processus ?

DB Certains n’ont pas saisi l’enjeu de l’accueil des personnes moins pratiquantes autrement que dans l’Eucharistie. Ils ont eu du mal à rentrer dans cette perspective.

SM L’idée a fait peur à certains paroissiens. C’était nouveau. Ils étaient habitués à autre chose. Mais on ne pouvait plus continuer comme cela. Nous avons lancé cette année la bénédiction des cartables. L’église était pleine ! Dans la foulée, des parents ont inscrit leurs enfants au catéchisme. Au lieu de 20 prévus, ce sont 60 enfants qui sont inscrits cette année, et dix encore sur liste d’attente !

Comment déployer un tel processus de type synodal à l’échelle de toute la vie d’une paroisse ?

DB Je crois en l’intelligence collective. Et personnellement, cela m’a beaucoup apporté de constater que d’une idée de départ est né ce projet enrichi par tous les échanges, la réflexion élaborée des équipes. J’avais une vision et une expérience pastorale. Mais le fait de collaborer avec des parents, travaillant parfois dans l’enseignement ou ayant d’autres expériences de transmission (scoutisme etc.), cela a réellement donné corps au projet. Il fallait vérifier que ces « dimanches de saint Pierre » ne divisent pas la communauté. Car le but est d’avancer ensemble.

Cet article fait partie du dossier thématique :Synodalité, construire une Eglise différente →

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IEV n°353 - Synode 2021-2023 : Construire une Eglise différente Se procurer le numéro →

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