Faisons un petit pas de côté… Avant d’apprendre à prier personnellement, l’enfant peut expérimenter la prière au sein même de sa famille. Une étape souvent marquante de sa vie spirituelle.
Par AUGUSTIN BOURGUE, prêtre du diocèse de Paris
Le premier défi de la prière en famille est d’oser se lancer : oser le proposer à sa famille, oser prier devant les autres, à voix haute, oser ouvrir un peu son cœur. On peut commencer très simplement : un signe de croix, fait lentement, et un Notre Père, en laissant un court silence après chaque phrase, et ça y est : vous avez prié en famille ! Rien d’insurmontable ! Peu à peu, on ajoutera un chant, la lecture d’un verset de l’Écriture, des intentions de prière… Mais se lancer dans l’aventure de la prière en famille, c’est se heurter rapidement à l’apparente inattention des petits, aux disputes pour souffler la bougie ou choisir les chants, aux acrobaties du petit dernier qui fait rigoler les autres, sans parler du refus de l’ado boudeur… Comment permettre une vraie rencontre, une intimité avec Dieu ?
La règle d’or
Il existe bien des “trucs” pour faciliter le déroulement de la prière familiale, mais une règle fondamentale doit surtout la conduire : il ne s’agit pas de faire prier les enfants, mais de prier avec eux. Autrement dit, le plus important est de prier soi-même pour les entraîner dans la prière. Il ne s’agit pas d’une technique, mais d’une attitude de fond : je suis avec mes enfants, au milieu d’eux, pour prier. Il s’agit d’une véritable ascèse, car le comportement des enfants pendant la prière peut me gêner, m’irriter ou m’attrister. Demeurer en prière, c’est choisir de prier avec tout ce qui se passe et présenter mes enfants tels qu’ils sont. Une question peut m’aider à relire notre prière familiale : « Ai-je prié, ne serait-ce qu’un court instant, pendant ce temps de prière familiale ? » Si non, il faut que j’y entre ou que nous l’organisions différemment… parlons donc d’organisation.
Moment et durée
Si certaines familles vivent une prière brève le matin, avant de partir ou sur le chemin de l’école, la plupart prient le soir. Avant le dîner, juste après, après le brossage des dents ou juste avant d’aller au lit : il n’y a pas de moment idéal. Pour trouver ce qui convient le mieux à votre famille, il faut essayer ! Une petite modification peut parfois tout changer. Pour la durée : entre cinq et dix minutes, mieux vaut en tout cas que les enfants la trouvent trop courte ! En cas de différence d’âge importante entre les enfants, ou si un des petits empêche les grands de prier, on peut opter pour une prière séparée (prier par exemple avec les plus petits au moment de leur coucher), et conserver la prière commune pour le dimanche ou d’autres occasions.
Soigner l’entrée dans la prière
Il est important d’aménager une courte transition entre le moment qui précède (repas, lavage de dents) et la prière. Ce n’est jamais du temps perdu, car il favorise la qualité du recueillement. Si l’on dispose d’un temps limité, mieux vaut soigner cette préparation et faire une prière plus courte, plutôt que de faire directement le signe de croix alors que personne n’est prêt. Il faut alors veiller à ce que chacun ait son espace, que les chamailleurs habituels soient séparés et que le dernier ou la dernière ait son doudou, voire un petit jouet (silencieux !) qui l’occupe. Il faut ensuite entrer soi-même dans la prière, se mettre sous le regard du Père, puis inviter les enfants à entrer dans la présence de Dieu. Si nous sommes nous-mêmes déjà en prière, cette invitation sera douce et paisible.
Préparation et participation
Tout ce qui favorise leur participation peut faire entrer les enfants dans la prière. En fonction de l’âge de chacun, ce pourra être : préparer le coin de prière (qui doit être à la hauteur des yeux des enfants), choisir des chants, les accompagner par la musique, allumer la bougie, formuler des actions de grâce, lire quelques versets de la parole de Dieu, dire un mot de commentaire, formuler des intentions de prière, etc. On peut même confier l’organisation de la prière à un enfant, ponctuellement ou à tour de rôle. Plus les enfants comprennent que cette prière est la leur et qu’ils ont un rôle à y jouer, plus ils y entreront avec joie et facilité.
Foi et simplicité
La prière en famille demande foi et simplicité. Foi, car même si l’on chante faux, si un petit se balade sur son camion, si certains demeurent muets et d’autres se disputent, Dieu est à l’œuvre ! Ce qu’il opère en chacun nous échappe, même s’il nous fait parfois la grâce d’en voir les fruits. Et simplicité, car cette prière est humble. Elle est à l’image de notre famille : pleine de grâces, de talents, d’amour échangé, mais aussi d’incompréhensions mutuelles et de tensions. C’est tout cela que nous présentons pour que Dieu le visite. C’est pourquoi aucune situation maritale ou familiale n’est incompatible avec la prière en famille. Alors n’hésitons pas à nous tourner ensemble vers Dieu, pour l’écouter et lui parler avec nos pauvres mots. Son Esprit habite et prie en chaque membre de la famille : confiance ! ¨