La Croix Glorieuse : cœur priant de la Communauté de l’Emmanuel

« Je trouve ma joie dans les souffrances que j'endure pour vous »

St Paul, Col 1, 24

La Croix Glorieuse rassemble des personnes souffrantes, membres de la Communauté de l’Emmanuel, dont la vocation est de prier et d’offrir leurs souffrances pour la fécondité des missions de la Communauté. Mystérieusement comblés d’une joie profonde d’union au Christ, les souffrants deviennent « utiles » au salut de leurs frères et sœurs, et accomplissent un « service irremplaçable ». Yves et Marie-Madeleine de Brunhoff sont les actuels responsables de la Croix Glorieuse.

« Pierre, nous n’avons plus l’appel communautaire ! » C’est par ces mots que plusieurs membres de la Communauté de l’Emmanuel se sont adressés à Pierre Goursat, son fondateur, pour lui signifier, qu’en raison de leur état de santé, ils s’essoufflaient et ne parvenaient plus à suivre le rythme de la vie communautaire. Cela a fait son chemin dans le cœur de Pierre Goursat qui a déclaré : « La communauté n’existe pas sans vous, vous êtes le cœur priant de la Communauté et offrant sa souffrance dans la vie communautaire » proclamant ainsi que la personne souffrante avait sa place et toute sa place dans la Communauté. C’est ainsi que quelques temps plus tard, dans les années 1985, La Croix Glorieuse vit le jour, ayant vocation d’inviter les membres souffrants de la Communauté à entrer dans une communion de prière et d’offrande pour les missions de l’Emmanuel.

« Tout seul on ne peut rien » aimait répéter Pierre : l’intuition était donc de se solidariser car la vie communautaire est vraiment une communion or une communion chrétienne ne peut pas laisser de côté quelqu’un qui souffre. » explique Yves de Brunhoff, actuel responsable de la Croix Glorieuse, avec son épouse Marie-Madeleine. « Mais cette forme de regroupement est très informelle : il n’y a pas d’engagement, rien d’institutionnel dans la famille de La Croix Glorieuse. C’est une démarche tout à fait libre. » Une démarche qui vient d’ailleurs rejoindre la demande de Jésus à Marguerite-Marie, cette religieuse visitandine du XVIIème siècle à qui Jésus est apparu plusieurs fois à Paray-le-Monial, de s’associer à ses souffrances le soir de Gethsémani.

Pour autant, l’idée même d’offrir ses souffrances et de s’associer à celles de Jésus n’est pas spontanément accessible à la compréhension humaine. « En effet, mais il ne s’agit pas d’avoir une vision doloriste ou complaisante de la souffrance » explique Yves. « N’oublions pas que notre pays a été très marqué, presque martyrisé par le jansénisme, et Paray-le-Monial (NDLR : les apparitions de Jésus à Marguerite-Marie à Paray-le-Monial) est une réaction très violente au XVIIème pour dire : l’amour du Christ n’est pas dans la souffrance pour la souffrance.  C’est pour cela qu’on a associé « glorieuse » au terme de croix. » Un bel oxymore pour exprimer que « la Croix Glorieuse est une croix où Jésus nous sanctifie dans l’œuvre de son esprit. C’est une croix de vie. » s’exclame Yves. « Nous constatons chez nos frères et sœurs souffrants la joie que Dieu leur donne, mystérieusement. » renchérit Marie-Madeleine. « Quand on parle d’une croix qui est glorieuse, c’est pour signifier qu’on sait que notre souffrance va être féconde, pas forcément visiblement, mais autrement. Cela peut sembler insensé, mais nous sommes vraiment les témoins privilégiés de cette joie vécue par nos frères et sœurs qui souffrent. La miséricorde de Dieu est tellement forte qu’elle les comble. »

Comblés de cette joie intime et profonde d’union au Christ, les frères et sœurs souffrants vivent aussi une fécondité missionnaire, bien difficile à mesurer mais pourtant bien réelle. Ils prient et offrent leurs souffrances pour toutes les missions de la Communauté de l’Emmanuel. En cela, ils ont une place à part entière dans la vie de la Communauté : une place cachée mais essentielle pour porter les valides, placés en première ligne.

« Surmonter le sentiment de l’inutilité de la souffrance (…) devient une source de joie. (…) La découverte du sens salvifique de la souffrance en union avec le Christ transforme ce sentiment déprimant. La foi dans la participation aux souffrances du Christ porte en elle-même la certitude intérieure que l’homme qui souffre « complète ce qui manque aux épreuves du Christ » et que, dans la perspective spirituelle de l’œuvre de la Rédemption, il est utile, comme le Christ, au salut de ses frères et sœurs. Non seulement il est utile aux autres, mais, en outre, il accomplit un service irremplaçable. »

Lettre apostolique Salvifici doloris, 1984, Jean Paul II, n°27

Et qui peut inspirer au-delà de la Communauté : comme nous le confie Yves, également diacre : « Il m’est souvent arrivé de dire à des prêtres, de les exhorter même, à aller mobiliser positivement et librement, bien sûr, toutes les personnes âgées et souffrantes qui vivent en EHPAD pour des objectifs de prière. On voit combien Dieu est présent quand on lui ouvre son cœur dans la détresse. »

« (…) que ce soit sous une forme ou sous une autre, la souffrance semble être, et elle est, quasi inséparable de l’existence terrestre de l’homme. »

Lettre apostolique Salvifici doloris, 1984, Jean Paul II, n°3

Indéniablement, la souffrance, la croix, font partie du chemin de l’existence.  « Nous sommes appelés à ne pas esquiver la souffrance si nous le pouvons, mais à la partager pour d’autres avec le Seigneur. » explique Yves. « Si nous n’offrions pas nos souffrances, le danger serait de tomber dans l’activisme, la bonne action ou encore l’ONG humanitaire : il y a beaucoup de choses formidables qui se font dans le monde mais le mystère du Christ c’est d’être en lui, profondément. »

Et en Lui, le Christ nous donne une joie que personne ne nous enlèvera : la joie des saints.

Recommandez cet article à un ami

sur Facebook
par Whatsapp
par mail