Le parcours Emmanuel Education à Paray, juillet 2022

Emmanuel  Education a organisé à Paray-le-Monial, dans le cadre de la session du 20 au 24 juillet, un parcours spécifique destiné aux enseignants, éducateurs et chefs d’établissement. Nous avons eu plus de 200 participants et ce fut l’occasion de nombreuses rencontres et de fructueux échanges. Nous rendons compte ici de l’enseignement du père Henry Fautrad sur la pédagogie de l’intériorité et des trois interventions d’un groupe de travail proposant un regard renouvelé sur la motivation des élèves.

Jalons pour une pédagogie de l'intériorité
Père Henry Fautrad

Si l’intériorité est une disposition naturelle à tout homme, elle doit cependant être éveillée, éduquée et cultivée. L’Eglise a une riche expérience à nous transmettre à travers de nombreuses pratiques dont les trois suivantes : relire sa journée, faire révision de vie, faire oraison.

1. Relire sa journée

Prendre chaque soir dix minutes pour s’arrêter et regarder sa journée, cela peut changer une vie.

La relecture de journée n’est pas une introspection. Ni une discussion de moi avec moi-même sur ma journée. Ce n’est pas non plus une enquête que j’aurais à faire, avec une appréciation morale, une liste de mes péchés sous forme d’inquisition intérieure. Non.

C’est avant tout une rencontre avec Dieu lui-même pour m’apprendre à aimer et libérer en moi la puissance de son Amour. C’est me laisser rejoindre par le Christ au cœur de ce que j’ai vécu aujourd’hui, c’est ouvrir ma journée à son regard.

Je prie à partir de ma propre histoire. Mon histoire est sainte, car le Seigneur y est présent : « Tu étais là et je ne le savais pas ». Il s’agit donc de prier à partir de ce qui s’est écrit aujourd’hui depuis ce matin, à partir de notre journée. Pour cela je vais dérouler les lieux et les personnes rencontrées, les visages, les lieux, les paroles.

Il y a un enjeu spirituel à faire le lien entre les divers événements que nous vivons, à sentir le mouvement d’ensemble d’une journée.

Comme vous pouvez le sentir, « relire » sa journée demande d’être à l’écoute du retentissement affectif en soi des événements et des rencontres vécues. Comment aussi ce que j’ai pu dire ou faire, m’a-t-il affecté ? Comment tout cela résonne-t-il en moi : est-ce de l’ordre de l’ouverture ? – paix, joie, dynamisme. (La consolation) – ou bien est-ce de l’ordre de la fermeture ? Tristesse, irritation, sécheresse… (Désolation).

C’est en fonction de ces mouvements en moi, de ces « motions », que je vais pouvoir reconnaître ce qui me conduit davantage vers la vie ou pas, ce qui m’aide à servir et à aimer davantage le Seigneur ou pas.

« L’affectivité » n’est pas un mal, c’est la dimension relationnelle de l’être humain, et nous avons à la prendre en compte dans notre relation au Seigneur. Saint Ignace de Loyola, à l’école des Pères, était reconnu comme un « maître de l’affectus »

Dans le premier temps de ma relecture j’ai reconnu ce qui m’ouvre à la vie en abondance et j’ai rendu grâces au Seigneur pour sa présence dans ma vie.

Dans un deuxième temps, à la lumière de son amour pour moi, j’ai repéré mon péché, mes enfermements, et je lui ai demandé pardon.

A la lumière de tout cela je peux maintenant regarder demain pour choisir ce qui m’ouvre à la Vie, au Christ, et demander au Seigneur la grâce d’écarter ce que j’ai repéré comme un obstacle.

2. Faire révision de vie

La révision de vie alimente et entretient la foi au Christ pour la rendre vivante et active dans la vie quotidienne. Elle appelle à en témoigner, c’est la mission de toute vie chrétienne de devenir rayonnante. La démarche s’établit en 3 étapes successives Voir, Juger, Agir. Cette pédagogie peut se vivre occasionnellement de façon personnelle ou régulièrement en petite fraternité de partage.

Voir
Dans la révision de vie, chacun est invité à raconter ou à rédiger par écrit dans son carnet personnel les évènements qui concernent sa vie personnelle, sociale, familiale, sa relation aux autres. Chacun est appelé à exprimer comment il vit et agit au travail ou dans le quartier, la part qu’il prend dans les débats et les actions, la vie associative ou les engagements artistiques ou politiques. La révision de vie privilégie les questions, les évènements, les actions et les efforts face à la logique économique d’exclusion. La révision de vie accueille les dynamismes qui construisent une société plus solidaire et permettent que la justice sociale, la dignité de l’homme, la recherche du Bien Commun et tous les autres principes de la Doctrine Sociale de l’Eglise reprennent leurs droits. Les moindres petits pas ont toute leur place et leur efficacité dans ce projet.

Juger
Dans le regroupement d’engagements différents, dans la diversité des charismes, des états de vie et des situations professionnelles et autres, la révision de vie est une expérience de foi en acte. Elle invite à l’accueil de la parole de Dieu. Elle permet le dialogue en vérité et la nécessaire confrontation personnelle avec l’Evangile du Christ. Choisissez en priorité une parabole de Jésus. Lisez la 2 ou 3 fois et confrontez-la au concret de votre existence et de vos paroles, de vos actes de vos oublis. Cela aide à relire ce qui est essentiel à vous-même et aux femmes et aux hommes de ce temps (Leur Espérance et leurs Souffrances). En partageant la vie, en la confrontant avec la Parole de Dieu, les Chrétiens se mettent en accueil de Jésus-Christ qui nous conduit au Père. Ils font l’expérience que Dieu donne la vie en abondance (Jean 10,10). Le dialogue entre les participants, nourri par l’Écriture, enrichit l’expression de foi individuelle et collective. La révision de vie construit et engage chacun dans la totalité de sa vie, comme homme et comme croyant. Elle aide à vivre des choix et des convictions dans la durée et la fidélité.

Agir
La révision de vie appelle à dire ce que la rencontre de Dieu change, transforme dans nos vies. Chacun exprime comment il est interpellé par la parole des autres et ce qu’il accueille de la Bonne Nouvelle du Christ-Jésus pour sa propre vie, ses engagements, ses responsabilités. La révision de vie ouvre à la prière et à la célébration. Elle renvoie les membres de l’équipe vers ceux dont ils partagent l’existence pour accueillir leurs raisons de vivre et d’espérer, et témoigner de leur propre foi. La révision de vie conduit à prendre des initiatives qui peuvent aboutir aux partages de foi.
« Pour mettre en pratique les principes sociaux, on passe, en général par trois étapes : l’étude de la situation concrète ; l’examen  sérieux de celle-ci à la lumière des principes ; enfin la détermination de ce qui peut ou doit être fait pour les appliquer suivant les circonstances de temps et de lieu. Ces trois étapes sont couramment exprimées en ces termes : voir, juger, agir. » (St Jean XXIII Encyclique Mater & Magistra)

 

3. Faire Oraison

I / Le fondement évangélique de l’oraison

En nous invitant à faire oraison, à “être oraison”, Thérèse de Jésus nous invite d’une certaine manière à imiter le Christ Jésus lui-même : « Or la nouvelle se répandait de plus en plus à son sujet, et des foules nombreuses s’assemblaient pour l’entendre et se faire guérir de leur maladie. Mais lui [Jésus] se tenait retiré dans les déserts et priait » (Lc 5, 15-16).

Dans le début de ce chapitre 5, Jésus enseigne la foule, puis il appelle les quatre premiers disciples enfin il guérit un lépreux. Et Luc nous donne ce petit sommaire des versets 15-16. Jésus fait le choix d’arrêter deux activités importantes : l’annonce de la Parole et la guérison des malades, pour une “activité” plus importante encore : la prière. Jésus cesse de “faire” pour “être” avec son Père.

Prendre le temps de l’oraison, c’est prendre le temps de laisser des activités qui peuvent être bonnes, très bonnes même, pour être avec Dieu, pour se laisser aimer. C’est un temps gratuit donné à Dieu.

C’est pourquoi, il est important de changer de lieux pour faire oraison. Si possible changer de pièce, pour couper avec mes activités précédentes. Si ce n’est pas possible, simplement changer de siège… Poser un acte qui me dit à moi-même que je change de registre… Cela reste à trouver, à inventer par chacun dans le concret de sa vie.

II / L’oraison, un acte théologal

Faire oraison, c’est non seulement quitter, cesser ces activités, mais c’est vivre à un niveau théologal. C’est mettre en œuvre la Foi, l’Espérance et la Charité. Croire en la présence aimante et agissante de Dieu que je viens rencontrer dans la prière au-delà de ce que je sens ou ressens. Espérer en la réalisation des promesses de Dieu qui en son Fils unique veut faire de moi son enfant bien-aimé. L’Espérance nous aide à traverser le temps, la durée… Aimer Celui dont nous savons qu’il nous aime. Contempler l’amour, car « l’amour attire l’amour ». Venir lui tenir compagnie par amour pour lui, gratuitement.

Prendre conscience que cette rencontre avec Dieu ne peut se vivre que dans la Foi, l’Espérance et la Charité. Plonger au niveau théologal (y replonger quand notre sensibilité reprend le dessus).

III / Le concret de l’oraison

Choisir de faire oraison ? C’est décider de cesser ses activités pour une activité placée sur un autre registre. Il peut être utile d’avoir un “coin prière” pour vivre ce rendez-vous. Ce peut être très simple : une Bible ouverte, un crucifix, une bougie, … Un petit espace qui nous aide à “passer” à autre chose. Il faut choisir le temps que l’on va prendre et s’y tenir, pour ne pas être livré à notre ressenti qui nous conduirait à prolonger quand on a le sentiment que « ça marche », et à nous arrêter quand cela devient aride.

Si possible que ce temps soit régulier et placé au même moment de la journée (si possible) de manière à devenir un habitus.

Henry Fautrad

Enseignement à trois voix : un regard renouvelé sur la motivation des élèves.

Virginie, Marie et Marie-Laure ont donné un enseignement à trois voix, fruit d’un beau travail d’équipe qui a réuni des compétences diverses :

Virginie Gouzon, coordinatrice Ulis à Montrond les Bains au sein de l’un des collèges qui est sous la tutelle de l’Emmanuel. Un dispositif Ulis y accueille 13 élèves en situation de handicap (autisme, trisomie, multi-dys, syndrome de Prader Willi, difficulté de comportement …) inclus dans les classes ordinaires de la 6ème à la 3ème.

Marie Darmé, qui enseigne les mathématiques au lycée Saint-Jean-Paul II de Montrond-les-Bains.

Marie-Laure Denonfoux, qui enseigne les sciences économiques dans le supérieur à l’IRUP (Institut Régional Universitaire Polytechnique) de St Etienne auprès de Bac+ 2, Bac+3 ainsi qu’à l’Université auprès de Master.

Leur intervention, intitulée Des leviers pour susciter en nous et chez les jeunes un élan « de vie », a été répartie en trois séances, sur trois jours :

  • Premier jour : des racines pour éveiller la motivation : bienveillance et affection, bonne gestion de l’autorité, mise en confiance de l’élève.
  • Deuxième jour : une éducation intégrale soutenue par le jeu et la joie.
  • Troisième jour : l’envol pour jaillir vers d ‘autres horizons : de la maîtrise au lâcher-prise.

L’ensemble de ces enseignements était étayé de nombreux exemples.

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