« Avec détachement et dans la charité fraternelle »
Lors du Forum Zachée, du 29 mai au 1er juin prochain à Paray-le-Monial, sur le thème « Tous héritiers : de qui ? De quoi ? Pour quoi ? Il sera question, entre autres sujets, de l’héritage matériel.
Souvent lieu de souffrance et de péché, l’héritage que l’on transmet ou que l’on reçoit, peut aussi devenir un lieu d’exercice de la charité et de gratuité.
Aux premières loges, Patrice Bonduelle, notaire, qui interviendra au Forum, nous partage son expérience et sa conviction, inspirée de l’Evangile : « Jésus nous invite à nous détacher des biens matériels. »

Pour préparer son intervention au Forum Zachée, Patrice Bonduelle, notaire en région parisienne, a relu les évangiles. « Le message de Jésus est très clair ! Il nous invite à nous détacher des biens matériels et à développer avec l’argent une relation saine. L’argent est utile et nécessaire pour vivre mais il ne doit pas devenir un lieu de culte ni un objet d’idolâtrie. Plus largement, toute la Bible est traversée par cette mise en garde de l’idolâtrie de l’argent ! C’est à entendre au premier degré ! »
De cette relecture des Ecritures, est née une conviction : « La clé pour hériter sereinement c’est d’être dans une attitude de détachement. J’ai déjà reçu de mes parents la vie, souvent l’éducation… et ce que je recevrai de mes parents quand j’aurai 50 ou 60 ans – avec l’allongement de l’espérance de vie, on hérite en moyenne 20 ans plus tard qu’il y a 50 ans – je peux considérer que c’est du superflu qui ne m’est pas dû. »
Pourtant, combien viennent dans le bureau du notaire pour réclamer leur dû ?
Pour poser le cadre, Patrice Bonduelle explique son rôle : « En tant que notaire, nous intervenons à deux moments-clés. D’abord, le plus souvent, très en amont du décès des personnes, lorsque les parents, au sens large, nous consultent sur la manière d’organiser la transmission de leur patrimoine.
Ensuite, au moment d’un décès, pour aider les héritiers à aborder et traiter les questions juridiques, administratives et fiscales de la succession. »
« On n’a jamais vu un coffre-fort suivre un corbillard. »
Pape François
Le bureau du notaire est donc un lieu important tant pour apprendre à transmettre que pour apprendre à recevoir.
Le juriste cite alors le chapitre 12 de l’évangile selon Saint Luc : « Au verset 15, Jésus nous exhorte : « Gardez-vous bien de toute avidité, car la vie de quelqu’un, même dans l’abondance, ne dépend pas de ce qu’il possède. » Puis Jésus poursuit par une parabole : C’est l’histoire d’un homme riche qui veut construire des greniers plus grands pour y amasser ses récoltes. Au verset 20, Dieu lui dit : « Tu es fou : cette nuit même, on va te redemander ta vie. Et ce que tu auras accumulé, qui l’aura ? » Ce verset m’a fait comprendre que nous devrions tous nous dire que nous sommes des passeurs. Nous recevons de nos parents pour ensuite transmettre à notre tour. Entrer dans cet état d’esprit nous permet de nous mettre à distance des biens matériels, de ne pas les consommer uniquement mais, si nous avons la chance d’en avoir, de les passer aux générations suivantes. »
Ainsi, lorsque des parents ont le souci d’anticiper leur succession, Patrice Bonduelle a à cœur de « les inciter à simplifier autant que possible leur situation patrimoniale – par exemple, à sortir d’une indivision avec des frères et sœurs ou à céder les parts qu’ils détiennent dans l’entreprise d’un ami – pour alléger la tâche de leurs héritiers. Et s’ils décident de favoriser l’un de leurs héritiers, à assumer avec courage leur décision auprès d’eux en la rendant publique pour ne pas leur ajouter des souffrances inutiles, après leur décès. »
Aux héritiers, Patrice aimerait passer un message : « Le conseil que je peux donner c’est d’aborder la chose avec détachement mais aussi avec gratuité et gratitude. Et si besoin, de faire du deuil et de la succession une occasion de réconciliation. Je suis marqué par ce que dit Jésus dans St Matthieu au chapitre 5, verset 23-24 : « Donc, lorsque tu vas présenter ton offrande à l’autel, si, là, tu te souviens que ton frère a quelque chose contre toi, laisse ton offrande, là, devant l’autel, va d’abord te réconcilier avec ton frère, et ensuite vient présenter ton offrande. »
Ces mots « va d’abord » posent la question du premier pas. Dans les familles, ce qui est terrible c’est d’entendre : comme c’est lui qui m’a offensé, c’est à lui de faire le premier pas vers moi. Mais combien de familles sont divisées depuis 10, 20 ou 30 ans parce qu’on reste dans cette posture absurde ? Or, Jésus ne nous dit pas : selon qui a tort ou raison, c’est à untel ou une telle de faire le premier pas. Non ! Il s’agit vraiment d’être complètement imprégné d’amour et de charité mais aussi du souci de la justice. »
Enfin, quand on l’interroge sur une bonne raison de venir au Forum Zachée, du 29 mai au 1er juin prochains, Patrice Bonduelle répond : « C’est une bonne occasion de se pencher sur des sujets qui portent en eux-mêmes l’enjeu de la cohérence de notre vie chrétienne ! Suivre Jésus c’est aussi regarder sa relation à l’argent et ici, aux biens matériels par le prisme de la charité fraternelle. »