La mission : un échange de dons !

La mission « ad gentes » est une école de formation pour la mission « ici »

« Allez dans le monde entier proclamer l’évangile à toute la création » Marc 16, 15. Si l’on peut être missionnaire de multiples manières, qu’est-ce que la mission « ad gentes » nous enseigne sur la mission que nous avons à vivre près de chez nous ? Comment vivre le déracinement et le mouvement qu’impliquent la mission lorsqu’on ne quitte ni son travail, ni son logement, ni sa famille ?

Echange avec le père Thomas Guist’hau, prêtre de l’Emmanuel, Fidei donum* au Brésil de 2017 à 2022, et aumônier de Fidesco, à l’occasion de la Semaine Missionnaire Mondiale qui aura lieu du 12 au 19 octobre prochain.

« La mission a changé ma manière d’être un homme, d’être un chrétien, d’être un prêtre » témoigne Thomas Guist’hau. Prêtre de l’Emmanuel, Thomas Guist’hau a été envoyé au Brésil, à Salvador de Bahia, comme prêtre Fidei donum de 2017 à 2022. Ordonné 12 ans auparavant, il a tout juste 40 ans. 

Thomas Guisthau 1

« J’ai fait l’expérience de la providence divine de manière particulièrement forte à la fois dans mon ministère de curé et dans ma vie personnelle. » Loin de ses repères, déraciné, le père Thomas fait l’expérience de sa pauvreté : « J’ai laissé alors plus de place au Seigneur. Et comme j’ai eu la chance de vivre cette expérience auprès de personnes elles-mêmes fragiles et pauvres, elles m’ont appris à la vivre en m’en remettant à la miséricorde et à la providence de Dieu. »

« La mission est un échange de dons. »

« En arrivant au Brésil », dit-il, « j’ai très vite compris que ma mission consisterait à établir un pont entre le lieu d’où je venais et le lieu où j’étais envoyé en mission. » Chargé de trouver des financements en Europe pour sa mission à Salvador, le père Thomas développe et entretient des réseaux de financeurs et pour que cela fonctionne, raconte ce qu’il vit sur place : « La mission, c’est un échange de dons. Nous avons tous quelque chose à donner, quelque chose à recevoir.

Thomas Guisthau 2

La mission « ad gentes », qui peut se vivre du Nord vers le Sud comme du Sud vers le Nord, est une expérience d’interculturalité, riche pour tous, comme nous l’a dit le pape Léon dans son homélie à l’occasion du Jubilé pour le monde missionnaire le 5 octobre dernier :

« Dans les communautés de vieille tradition chrétienne, la présence de nombreux frères et sœurs venus du Sud du monde doit être accueillie comme une grâce : elle renouvelle le visage de l’Église et suscite un christianisme plus ouvert, plus vivant et plus dynamique. En même temps, chaque missionnaire envoyé dans d’autres terres est appelé à habiter les cultures qu’il rencontre avec un respect sacré, discernant et valorisant tout ce qu’elles ont de bon et de noble, et y apportant la prophétie de l’Évangile. »

« La mission au loin est une incroyable formation pour vivre la mission locale ! »

A son retour en France, le père Thomas est travaillé par une grande question : « Comment être fidèle à ce que j’ai vécu là-bas maintenant que je suis curé dans une paroisse riche à tous points de vue ? Comment ne pas perdre la joie que j’avais découverte ? »

Une question que pose aussi, à sa manière, Rosette. Cette jeune béninoise a été volontaire Fidesco Sud-Nord l’année dernière à Marseille. Elle écrit : « Ça fait quatre mois que je suis rentrée, mais la mission me manque encore tellement. Tous ceux que j’ai rencontrés et appris à aimer pendant la mission me manquent tellement. C’est comme si j’avais laissé une partie de ma vie en France. Parfois c’est douloureux, mais parfois de petits souvenirs m’arrachent le sourire. »

Que faire pour que la mission ne soit pas une parenthèse, un livre qu’on referme ?

Grâce aux moyens dont il dispose alors, dans sa nouvelle paroisse à Bois-Colombes (92), Thomas Guist’hau lance des projets qui deviennent ses projets. « Je comptais un peu moins sur la Providence mais le Seigneur m’a montré que j’avais pris le pas sur Lui, que je ne le laissais pas passer devant. » Le père Thomas comprend que « la mission au loin, souvent vécue avec radicalité dans les conditions de vie, dans l’éloignement et le déracinement, nous forme à être attentif pour reconnaitre, dans des conditions de vie plus habituelles, la manière subtile dont le Seigneur nous conduit et agit. La mission au loin est une incroyable formation pour vivre la mission locale. »

Thomas Guisthau 3

Et le père Thomas d’ajouter : « L’Eglise est catholique, donc universelle, elle ne pourra jamais cesser de vivre la mission ad gentes qui est plus que jamais une urgence pour lutter contre les replis sur soi. »

Être un missionnaire amoureux, dans le monde sans être du monde

Pourtant, si tous ne sont pas appelé à vivre la mission au loin, le monde « a besoin de missionnaires amoureux, toujours captivés par le Christ et qui transmettent inlassablement cet amour qui a changé leur vie (…) pour que d’autres puissent percevoir la bonté et la beauté du Bien Aimé à travers leurs pauvres tentatives. » Dilexit nos n°209.

Être un missionnaire amoureux, c’est vivre apparemment comme tout le monde, tout en étant différent, comme on peut le lire dans la Lettre à Diognète, un texte ancien du 2ème siècle après Jésus-Christ : « Les chrétiens ne se distinguent des autres hommes ni par le pays, ni par le langage, ni par les coutumes. (…) Ils passent leur vie sur la terre, mais ils sont citoyens du ciel. (…) Les chrétiens habitent dans le monde mais n’appartiennent pas au monde. »

Autrement dit, explique Thomas Guist’hau, « il s’agit d’entrer dans une attitude de fond qui consiste à ne pas fuir le monde et à oser s’y confronter, à sortir de l’Eglise pour se laisser enseigner par le monde. » Cette attitude, qui s’apparente à une forme de déracinement, conduit naturellement à la rencontre de l’autre, une rencontre qui transforme et porte du fruit, en premier lieu pour le missionnaire. « Une expérience pas si lointaine de celles des missionnaires qui partent à l’autre bout du monde ? »

Message du pape pour la Semaine missionnaire mondiale

Pour la semaine missionnaire mondiale, qui aura lieu du 12 au 19 octobre prochain, le pape François nous a laissé un message : « Les missionnaires de l’espérance sont des hommes et des femmes de prière, parce que « la personne qui espère est une personne qui prie », comme le soulignait le vénérable Cardinal Van Thuan. (…) N’oublions pas que prier est la première action missionnaire et en même temps « la première force de l’espérance » (Catéchèse, 20mai 2020). (…) En priant, nous gardons allumée l’étincelle de l’espérance, allumée par Dieu en nous, pour qu’elle devienne un grand feu qui illumine et réchauffe tout autour, y compris par des actions et des gestes concrets inspirés de la prière. »

*Fidei donum – don de la foi : Ce sont les deux mots latins en tête de l’encyclique du Pape Pie XII du 21 avril 1957 intitulée « Fidei Donum » invitant les évêques à porter avec lui « le souci de la mission universelle de l’Eglise », non seulement par la prière et l’entraide, mais aussi en mettant certains de leurs prêtres et fidèles à la disposition de diocèses d’autres continents. Les prêtres envoyés, restent attachés à leur diocèse d’origine et y reviennent après plusieurs années passées en mission. On les appelle souvent « Prêtres Fidei donum.»

Fidesco est une ONG au service du développement et de la solidarité internationale depuis plus de 40 ans qui envoie des volontaires au service de l’Eglise. 

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